Quand les choses se font naturellement... [Lucy]

Cela allait faire plus d’une semaine que le spot publicitaire avait été bouclé, que Lucy n’allait plus se faire maquiller par des professionnels… Qu’elle n’allait plus à l’entreprise de Kurtis quoi. Et étrangement, ça lui manquait. Et il y avait de quoi. C’était agréable de se faire chouchouter de la tête aux pieds par des professionnels, de n’avoir qu’à sourire ou jouer vaguement la comédie et empocher une coquette somme en guise de salaire à la fin. A qui cela ne plairait pas, sérieusement? Et pourtant Lucy, aussi discrète soit-elle, n’avait jamais voulu se mettre en avant. Et la voilà aujourd’hui, égérie d’un parfum. Comme quoi la vie nous fait faire des choses complètements incroyables parfois. Depuis que le tournage de la publicité avait prit fin et qu’elle avait été montrée au monde des consommateurs, Lucy s’étonnait encore à se voir apparaître lors des pauses publicités à la télévision. La première fois qu’elle s’était vue, c’était un jour où elle n’avait rien à faire et elle zappait les chaînes sans grande conviction jusqu’à qu’elle tombe sur… elle. Bah ouais, elle-même. C’était vraiment étrange comme sensation, vraiment… bizarre. De se voir là, dans une publicité, à la télévision. Le spot était très bien tourné, mais Lucy ne pouvait s’empêcher de ne pas se trouver parfaite dedans. En même temps, la confiance et elle ça faisait bien deux. Peut-être était-ce normal d’éprouver ce genre de sensation? En tout cas elle se rappelait très bien aussi, qu’après la diffusion du spot à la télévision, Jimmy l’appela pour la féliciter encore une fois. Il était vraiment adorable, Kurtis avait eu raison de l’embaucher.

En tout cas, les jours passèrent, et Lucy commençait à avoir un peu l’habitude de se voir. Heureusement que les personnes ne la reconnaissaient pas dans la rue. Juste une fois où une jeune fille de son âge un peu plus jeune qu’elle lui dit qu’elle avait acheté son parfum et qu’elle l’avait trouvé très bien. Cela ne la choqua pas, mais le truc c’est qu’après elle lui demanda de prendre une photo avec elle pour qu’elle puisse la montrer à ses amies. Un peu déconcertée, Lucy ne put qu’accepter gentiment. Encore plus étrange que se voir à la télévision. Heureusement que c’était la seule pour l’instant à lui avoir demandé ce genre de choses.

Parce que, mine de rien, tout cela lui remuait l’esprit. Oh, ce n’était pas bien méchant mais elle y pensait tout de même. Même en étudiant tiens, ce qu’elle faisait à l’instant même! Elle lisait les phrases, mais sans les lire. Enfin, elle n’était pas concentrée du tout. Elle se trouvait sur le canapé, Kurtis n’était pas encore rentré du travail, et elle observait son livre en ayant la tête ailleurs. Ce n’est que la sonnerie de son téléphone portable qui la réveilla. Sauf que son portable était dans sa chambre. D’un bond, elle se leva du canapé puis couru à moitié jusqu’à la pièce où provenait le son. Une fois qu’elle réussit à localiser l’appareil, elle l’attrapa rapidement puis observa l’écran : le numéro n’était pas répertorié. Fronçant les sourcils, elle décrocha quand même l’appel :

- Allô?

C’était peut-être un producteur, ou quelqu’un qui voulait la prendre pour faire plus de publicités. Elle avait son numéro à disposition maintenant, comme lui avait dit Kurtis. Ou peut-être que ce n’était pas du tout quelqu’un de ce milieu. Enfin bref, elle n’allait pas tarder à le savoir.

Alors elle en apprenait des choses, Chris avait dû beaucoup travailler pour l’oublier. Non, mais elle comprenait parfaitement qu’il ne l’ait pas appelé, une inconnue qu’on rencontre dans un fast-food ce n’est pas la première chose à laquelle on doit se soucier. Et puis, étant mécanicien, Lucy comprenait parfaitement qu’il ait du boulot et qu’il n’ait pas la tête à autre chose, surtout à elle avec qui il avait discuté juste une petite demi-heure. Alors maintenant elle allait savoir le comment du pourquoi il s’était soudainement rappelé d’elle en… faisant ses courses. Ouais, Lucy n’avait pas tilté qu’il l’avait pu voir lors d’un spot publicitaire ou sur une affiche de propagande. Non sérieusement, elle ne l’avait pas compris jusqu’à qu’il le lui dise et qu’il lui fasse des compliments en plus! Si elle était devant lui, elle aurait rougis à coups sûrs! Elle se contenta donc de faire un grand sourire pour elle-même, mais qui devait se sentir à travers le téléphone portable lorsqu’elle prit la parole :

- Oh c’est gentil, merci! J’espère que le parfum plaira à ta sœur!

Il n’y avait rien à dire, elle était toute enjouée la petite Lucy. Du moment que Chris ne lui demande pas un autographe, tout allait bien. Et puis le fait qu’il se montre gêné par peur qu’elle croie qu’il ne l’appelait juste à cause du spot, ça la fit rire encore une fois. Ca la faisait rire parce d’un côté, elle se reconnaissait dans ce que Chris disait. Limite elle aurait pu le dire elle aussi dans un autre contexte!

- Ne t’inquiète surtout pas pour ça Chris.

Il ne fallait pas qu’il s’inquiète pour ça, surtout avec Lucy comme interlocutrice. La jeune femme avait un cœur gros comme ça et jamais ça ne lui traverserait l’esprit de se montrer odieuse ou arrogante. Non, ça ce n’était pas du tout son caractère loin de là. Alors, comment elle allait?

- Bah écoute, moi tout va bien. Ca fait juste bizarre de se voir sur écran, mais comme on dit on s’habitue à tout!

Enfin, elle espérait pouvoir s’y habituer. Mais ça ne devait pas trop être compliqué hein?

- Mais je suis heureuse en ce moment, donc c’est le principal.

C’est vrai quoi, elle était logée, elle faisait des études qu’elle appréciait et elle avait un petit ami. Quoi de plus?

Assis sur le canapé, Chris se remémora vaguement en tête le spot publicitaire. Il s'était allé jusqu'à se demander d'ailleurs si c'était vraiment la fille qu'il avait rencontré des jours plus tôt. Si ce n'était pas la jeune fille timide, un peu réservée, manquant de confiance en elle.... Si, c'était bien elle. Et elle semblait rester elle-même, avec cette même gentillesse...

J'espère que ça lui plaira aussi. Ca m'enquiquinerait bien, sinon, de lui avoir acheté. Dans le pire des cas, je le garde... même si d'origine, il est pour femme.

Oh, s'il pouvait bien plaisanter. Même s'il se voyait mal porter un parfum de femme, quand même, elle devrait l'apprécier, la Cassandre. Il avait peut-être de sales goûts vestimentaires, selon elle pour le faire chier, hein, on ne pouvait pas dire qu'il avait réellement de mauvais goût. Oh non ! Genre, dans une autre vie, ouais, il aurait pu faire créateur de mode, maquilleur ou tout simplement esthéticien, qui savait ? Sa mère l'aurait bien inspiré puisqu'elle était esthéticienne, donc bon. Hein ! Mais non, Chris avait plutôt choisi de se salir les mains dans les moteurs de voiture. C'était son choix et il était heureux ainsi.

En tout cas, que ça faisait plaisir de voir qu'ils se parlaient, qu'elle était ouverte à la conversation... Bon, d'un côté, si elle lui avait filé son numéro de téléphone, c'était pour discuter, non ? C'était un peu le but. Même si ça pouvait sembler bizarre au milieu de New York mais comme quoi, on pouvait tomber sur des « anges », si on pouvait appeler des gens biens par ici.

Bien sûr ! On s'habitue à tout ! J't'avoue que j'ai eu du mal à accepter de me voir en statue de cire mais on s'habitue.

Ca se voyait dans sa voix qu'il plaisantait et qu'il était encore dans son délire de musée Grévin là. Ah ben oui, il n'avait pas oublié que la Lucy venait de la grande et magnifique ville de France.

Je suis content que tout va bien ! Continua-t-il revenant un peu plus sérieux. Oui, c'est le principal d'être heureux...

Ca lui rappelait bien un dessin animé, non ? Il en fallait peu pour être heureux, hein? Se satisfaisant du necessaire. Ca ne vous rappelle rien ? Et ce fut là qu'il se rendit compte que... Ben il faisait le maximum pour l'être... Il avait beaucoup changé depuis le temps... Depuis où sa vie avait commencé un peu à dégringoler. Où ses parents lui avaient tourné le dos, où par la suite Matthew, son petit ami, se noie... Bon, c'était certain que depuis toutes ces années, il avait passé outre à tout ça... Il avait eu des amis comme Tex sur qui compter, il avait trouvé sa chienne Brindille... il y avait sa soeur Cassandre, il n'avait pas été seul... Sans oublier ses voitures à manipuler... Mais autant prendre le côté des choses malgré que la vie n'était pas forcément facile. Pendant cet instant de réflexion, Chris eut comme une absence mais il fallait qu'il se ressaisisse et finit par se connecter à la vie réelle... Oui, car en ce moment même, il ne fallait pas oublier qu'il était au téléphone... Et ce fut bien sûr Brindille qui le réveilla de ce moment de transe tout en mordillant la télécommande de la télévision à ses pieds... Ah, cette chipie, quand ce n'était pas les chaussures, c'était forcément la télécommande.

Arhhh ! Brindille ! Donnes-moi ça, toute suite !!!

Chris se baissa pour récupérer alors la télécommande, il réussit du coup à la récupérer, et vu la réaction, Brindille comprit, et fit ses airs : non, je t'en prie, ne m'engueule pas...

Excuses-moi, Lucy... C'était ma chienne ! Elle bouffait ma télécommande...

Ouais, quelle vie, hein ? Chris fit une légère moue, tenant à deux doigts ce bidule, et chercha dans la salle de bain, quelque chose qui pourrait un peu désinfecter tout ça, et puis après voir un peu l'état des touches si ça marchait toujours cette connerie.

Je sais pas si tu as des animaux, toi... C'est cool mais des fois, c'est très chiant.

Ouais, enfin il disait ça mais il aimait sa chienne, ce beau labrador.

Je devrais m'en rendre allergique, peut-être... Je dis ça mais j'avoue qu'elle me manquerait...

C'était limite s'il parlait avec lui-même et qu'il se faisait rire tout seul, avec toutes les conneries qu'il pouvait débiter en un fragment de secondes. Ouais, il était un peu fou, le Chris mais bon, ça ne devrait pas vraiment ennuyer son interlocutrice puisqu'elle en riait.

Ca lui faisait plaisir d’avoir Chris au téléphone. Même si elle ne le connaissait pas du tout, qu’elle ne l’avait vu qu’une petite heure en réalité, c’était comme si elle le connaissait déjà depuis longtemps. C’était facile de parler avec lui, toujours dans l’humour et toujours en rigolant. Ca lui changeait carrément les idées en fait, elle ne pensait plus rien, juste à ce que le blondinet racontait derrière son téléphone. Comme sa blague avec la statue de cire où Lucy ne put s’empêcher de rigoler une nouvelle fois. Elle pouvait parier que même si elle était déprimée ou quelque chose dans ce genre là, il arriverait tout de même à lui redonner le sourire. C’était fou les personnes comme ça, comme un don du ciel. Mais là pour le moment, il n’y avait aucune raison qu’elle déprime la petite. Comme elle lui avait dit, elle était heureuse et c’était le principal. Mais quelque chose lui dit que Chris ne ressentait pas vraiment cette même chose. Car après qu’il ait répondu à sa phrase, il y eut un petit silence. Il était bref, mais Lucy ne savait trop quoi dire pour l’interrompre. Elle avait peur de dire quelque chose de déplacé, car elle ne savait pas trop ce que pensait le blondinet de l’autre côté de l’appareil. Mais quelque chose les tira tous les deux de ce silence et Lucy ne put s’empêcher de froncer les sourcils en entendant ce qui se déroulait derrière le combiné. Apparemment c’était la chienne de Chris, une certaine Brindille, qui faisait des siennes. Et là bam, Lucy ne put s’empêcher d’éclater de rire une nouvelle fois.

- Non je n’ai pas d’animal de compagnie. Quand j’étais plus petite, j’avais un hamster mais c’est tout ce que j’ai eu.

Oui, quand elle habitait à Paris, elle en avait un qui s’appelait Noisette. Oui je sais, très original comme nom. Encore, elle aurait pu l’appeler Hamtaro. Il avait sa petite cage, sa petite roue et il vivait dans la chambre de la petite. Jusqu’au jour où il rejoignit les siens au ciel, sûrement parce que Lucy lui donnait trop à manger, le pauvre avait grossi à vu d’œil en quelques jours. Et comme ses parents ne s’en occupaient pas, le pire arriva. C’était triste quand même de quitter un ami comme ça. Et c’était tout juste quand Chris disait qu’elle lui manquerait. C’est fou comme un animal peut vous tenir cette compagnie.

- Oui, j’en suis persuadée. Il faudra que tu me la présente un jour, j’adore les chiens!

En fait, elle adorait tous les animaux. Si elle ne faisait pas d’études pour être avocate, elle en aurait fait pour être vétérinaire. Oui, c’est carrément l’opposé, mais c’est comme ça. Finalement elle avait choisi avocate, pour faire honneur à sa mère.

- Je t’inviterai un jour chez… moi.

Elle ne savait pas trop comment dire. Parce que ce n’était pas chez elle, mais chez Kurtis. Mais bon, si elle commençait à aller dans ce terrain là, elle ne s’en sortirait jamais.

Finalement elle était très fière de son petit hamster. A en entendre Chris, sa sœur Cassandre avait d’autres goûts pour les animaux. En même temps, comme on dit : chacun ses goûts. Mais c’est vrai que les sortes d’animaux qu’elle souhaitait n’étaient, comment dire, pas très communs.

- Ah mais c’est original les reptiles! Bon j’avoue que moi non plus, je n’oserai pas en avoir. Je préfère les choses calmes et sans problèmes.

Dit-elle en rigolant à moitié. C’est vrai quoi, avec un reptile Dieu sait ce qu’il peut vous faire un jour. Combien de fois elle avait entendu des histoires où un serpent grossissait à vue d’œil jour par jour pour se préparer à manger son propriétaire. Des histoires horribles! Alors qu’un petit hamster, un petit lapin limite ça vous griffe et encore, c’est tout gentil tout mignon. Et s’il fallait aussi les surveiller tous les jours pour ne pas qu’il arrive quelque chose, bonjour la vie. Lucy avait autre chose à faire. Mais bon aujourd’hui, elle n’avait pas d’animaux, donc là n’était pas le problème. Et si l’envie lui prenait d’en avoir, ce ne serait sûrement pas un reptile, ô grand jamais.

Enfin bref, leur conversation avait tourné sur l’envie de se revoir. Et encore avec un animal puisque cette fois-ci c’était avec la chienne de Chris : Brindille. Ouais, c’était original comme nom, alors que tout le monde pense à appeler son chien Médor, lui c’était Brindille.

- Alors si Brindille va m’adorer, je suis partante! Attends, je vais voir quel jour je suis libre… Quitte pas.

Lucy posa le téléphone sur la table basse puis s’en alla rapidement dans sa chambre, cherchant son agenda. Où l’avait-elle mit? Ah le voilà. Elle feuilleta rapidement le petit livret pour trouver un jour où Chris et elle pourraient se voir. Elle n’avait pas non plus un emploi du temps de ministre, mais avec les cours et les quelques rendez-vous qu’elle avait décroché, il fallait mieux qu’elle regarde pour ne pas poser un lapin au blondinet. Revenant en sautillant dans le salon, elle attrapa le téléphone puis le mit à son oreille :

- Chris? Alors, tu es libre le week-end prochain? Samedi ou dimanche comme tu veux, je suis à toi.

Façon de parler hein. Mais c’est vrai que c’était le seul week-end où elle était sûre d’être présente à 100%. Maintenant, il ne restait plus qu’à voir si Chris était disponible également.

Après tout, quelque soit l'animal, c'était plus ou moins une charge, il fallait s'en occuper, et tout ça... Mais quelle compagnie, c'était ! On pouvait se sentir moins seul, et c'était complétement différent de l'être humain. Non ? Ne préférez-vous pas un chien ou un chat que d'un homme ?

Lucy était très sérieuse quand elle lui disait qu'elle aimerait l'inviter à le revoir, ça faisait plutôt très plaisir. Oui, très plaisir à entendre. Il n'y avait pas de quoi de douter d'elle, non ? Genre maintenant elle était devenue une star et avait un emploi de temps de ministre qu'il lui fallait peut-être une assistante pour qu'elle lui prenne ses rendez-vous, et puis avec les études, ce n'était pas forcément facile. Qu'est-ce qu'elle lui avait dit la dernière fois ? Qu'elle faisait des études de Droit ? Ouais, c'était quelque chose.

Oui ? Réagit-il lorsqu'il l'entendit reprendre le combiner et l'appeler.

S'il était libre weekend prochain et tout ? Chris ne put s'empêcher d'esquisser un sourire, un sourire plutôt bête.

Que dis-tu de samedi ?

D'ailleurs, Brindille restait attentive à ce que disait Chris à côté, elle était marrante. Le blondinet prit le coussin du canapé, le mit au bout du nez de Brindille et le balança en arrière rien que pour la faire agiter. N'importe quoi !

Alors, on fait comment ? Je passe te prendre, on se promène ?

S'il passait la prendre, ou plutôt, qu'ils se retrouvent quelque part, à une heure précise. A elle de décider.