Petit prince, dessines-moi un mouton [Taylor]

Se lever.
Il devait se lever.
Bon sang, il était quelle heure, là?
Étendant le bras en dehors de la couette, le jeune homme tâtonna la table de chevet à la recherche de son portable, mais, ne le trouvant pas, il se redressa légèremet, les yeux toujours clos, dans le but d'atteindre l'objet convoité. A la place, il s'écrasa sur le sol, emportant les draps avec lui. Avachit par terre, tel une gracieuse chenille en manque de sommeil, Taylor Hope Green poussa un soupir à fendre l'âme de n'importe quel gros méchant au cœur de pierre et s'étira comme un gros matou, à même le parquet de sa chambre.

La veille? Il avait...euh... il avait fat des choses, sûrement. Mais sa mémoire l'avait lâché entre le moment où il quittait la piste de danse pour aller aux toilettes et celui où il retrouvait enfin ses clefs, dans la poche d'un blouson qui ne lui appartenait pas. Blouson avec lequel il avait dormi.
Gros sale.
Mille (au moins!) grognements plus tard, le châtain était assis, ses yeux clairs fixés sur le 13"51 de l'écran du smartphone. Phok... L'esprit embrumé du jeune New Yorkais était complètement embrumé, et le corps prit simplement les commandes. Go douche.

La tête inclinée vers l'arrière, la bouche légèrement entre-ouverte et les paupières closes, Taylor laissait l'eau ruisseler sur sa peau. Quatorze heure. Que faire ? Il ne travaillait pas, étant en congé ; il n'avait pas les mioches dans les pattes puisqu'on était en semaine et qu'ils étaient à l'école ; puis pas envie de travailler pour le sujet que son père -Martyn Green, photographe et journaliste du New York Time- lui avait gracieusement offert. Pas envie de se faire une petite illustration aujourd'hui. 'Fin, cet après midi, quoi.
Vêtu d'une serviette de bain, le jeune homme erra un moment dans la petite maison de banlieue, se baladant avec une bouteille de jus de pomme jusqu'à la table du salon. Alors qu'il en buvait une gorgée, un post-it rose flashy plaqué sur l'un des dossiers de son père attira son attention.
Acheter de l'acrylique CMYK
Oil-barre orange + white Sp.
Petit gris
Papier rough    

Pour beaucoup de personnes, cette liste exhaustive écrite à la va-vite aurait été survolée et agrémentée d'un petit "ah, ces artistes! Dans quel monde ils vivent?"
Si Martyn Green était officiellement photographe, il avait également la peinture comme passion. D'ailleurs, c'est en voulant vendre une toile en pleine rue que le jeune anglais avait rencontré Lise, étudiante française en voyage culturel à Paris. Mais ceci était une tut autre histoire.
Se collant le post-il au torse, Taylor s'en retourna dans a chambre, s'habilla rapidement d'un simple jean-teeshirt-basket, et sauta sur son skate, casque aux oreilles, pour se diriger vers la boutique d'art et création qu'il fréquentait depuis môme.
Après un slalom entre les voitures et les passants, le jeune homme poussa la porte du commerce et prit la direction des pots de peinture.

CMYK. Cyan, Magenta, Yellow, Black. D'une main habituée, le jeune adulte se saisit des quatre couleurs que son paternel avait voulu acheter et, par précaution, y ajouta le blanc. Fidèle à la marque *X*, Taylor ne put s'empêcher de jeter un coup d’œil à sa voisine, une jeune maman qui avait choisit un pot différent des siens. Et, mauvaise habitude, la bouche du jeune homme s'ouvrit d'elle même, la voix en sortant sans prévenir :

- Je ne vous conseille pas cette marque, la peinture a un effet plastique lorsqu'on l'applique sur une toile de coton, et le rendu est juste dégueulasse car ça craque de partout.

Et vous êtes? Un emmerdeur qui se mêle de ce qui ne le regarde pas.

- 'Fin, je voulait pas vous déranger, hein! Juste vous éviter d débourser pour une piètre qualité. Sauf si c'est pour bébé, mais il me semble un peu jeune pour les pinceaux!

Un petit rire accompagna le regard que lança Taylor au landau avant de se changer en sourire pour la jeune maman.