Back On The Bottle [Lucy]

Cela faisait plusieurs jours que Lucy vivait dans l’antre de Jericho. Et franchement ce n’était pas déplaisant. Un appartement de plus de 200 m² pour vous toute seule? Enfin, en comptant Kurtis. Mais il travaillait beaucoup, donc Lucy qui finissait toujours plus tôt que lui rentrait chez le patron et profitait de tous les avantages. Elle avait découvert des salles de yoga, de billard et même une piscine! C’était tout bonnement magnifique. Et de plus, la colocation se passait à merveille. Kurtis était vraiment un ange. Dès le lendemain où elle fut mise à la porte par son ancien logeur, il avait appelé ce dernier pour lui demander de ramener ses affaires. Et sous les menaces un peu. Elle lui avait dit qu’elle voulait s’en occuper elle-même, c’étaient ses problèmes de toute façon! Mais non, le PDG avait à tout pris voulu s’en occuper et à cœur joie. En fait, il l’avait déjà fait quand Lucy avait compté appeler le proprio. Sacré Kurtis. Elle ne savait pas quoi en penser, pourquoi faisait-il tout ça pour elle? Il était peut être d’une bonté tout simplement divine. Elle était bien tombée alors. Non franchement, elle aimait cohabiter avec cet homme. Elle l’attendait chaque soir où il rentrait un peu crever il fallait le dire, mais son visage lui donnait le sourire. Mais ça s’arrêtait là, enfin c’était son patron quand même. D’ailleurs en parlant de job, il lui avait communiqué qu’elle recevrait son salaire bientôt. La publicité du parfum allait de bon train. Excellent, une bonne nouvelle puisqu’elle était à la recherche d’un nouvel appartement. Chaque jour elle attrapait un de ces journaux de l’immobilier et elle surlignait ce qui lui convenait. Elle n’allait pas toujours rester chez Kurtis, non? Même si c’était plus que tentant. Y’avait l’appartement et… lui. Elle commençait à l’apprécier, c’était quand même un bel homme il fallait le dire. Drôle, gentil. On vous décrirait presque l’homme parfait! Mais il y avait sûrement des choses qu’elle ne voyait pas chez lui. Personne n’est parfait.C’est ainsi, qu’on arrive à une soirée où Lucy découvrit un point faible chez Kurtis.

Une journée banale se présentait. Elle se levait, croisait vite fait Kurtis dans la cuisine pour le petit déjeuner. Avec le train-train naturel du bonjour, comment ça va, au revoir, passe une bonne journée et de suite au boulot. Dans son cas, l’université. On était vendredi et elle avait toute la journée cours. Cool, elle en apprenait des choses. Donc, la journée se passa tranquillement. Elle rentra chez elle, enfin chez Kurtis, à 18h à peu près. L’heure où le patron était censé rentrer de son travail. Enfin, depuis qu’elle vivait ici il rentrait pratiquement tous les soirs à cette même heure. Mais pas ce soir là. Il avait sûrement beaucoup de travail, et Lucy le comprenait. Elle n’allait pas se mettre à s’inquiéter quand même. Il était grand et il se débrouillerait très bien. Elle passa alors le reste de la soirée seule, vu que Kurtis ne se pointait pas. Elle prit des choses pour grignoter dans le frigo puis se mit à réviser ses cours. Quand on n’a rien à faire, on s’occupe comme on peut. Surtout qu’elle savait de quoi elle parlait, avant de se retrouver ici elle était toujours seule chez elle. Bref, les heures passèrent 20h, 21h, 22h, 23h… Toujours aucune trace de ce bon vieux Kurtis. Il était sûrement invité par quelqu’un, une femme (par déduction) et il avait oublié de le lui communiquer le matin même. Pas de problème, elle n’était pas sa mère, elle n’allait pas surveiller ses moindres faits et gestes. La jeune femme décida donc d’aller prendre une douche, mettre sa nuisette (oui, maintenant elle avait son pyjama) qui était un beau cadeau de sa mère et qui n’était guère plus longue que la chemise bleue de Kurtis. Puis en suivant la logique, elle se mit au lit. Mais sans grand succès pour dormir. Elle tournait et se retournait. Rien. Elle n’entendait pas Kurtis arriver. Est-ce qu’elle était en train de s’inquiéter? Mais non. Peut être devait-elle l’appeler sur son portable pour voir si tout allait bien? Non, ça ne le faisait pas. C’est alors qu’elle entendit la porte d’entrée s’ouvrir. Ah, il était arrivé en…chantant? Pourquoi il chantait? D’accord, il pouvait être heureux et chanter, mais à ce moment ça virait à l’étrange. Lucy se redressa sur le lit puis observa le réveil à côté d’elle : 1h17. Pourquoi il disait que ça tournait? Qu’est-ce qui tournait? La jeune femme ne pouvait plus tenir dans son lit donc elle décida de se lever et d’aller voir ce qu’il se passait dans le salon. Elle traversa le couloir jusqu’à arriver sur un Kurtis complètement… déchiré? Oui, vu la manière dont il l’accueillait, c’était spécial. Elle le vit s’avancer vers un elle d’une démarche presque comique, il prit son visage entre ses mains et l’embrassa sur le front. Au passage, Lucy remarqua qu’il sentait l’alcool. Conclusion : il avait bu. Elle remarqua sa veste par terre, il devait l’avoir jetée puis elle reposa ses yeux sur lui. Il n’agissait pas de la même manière de ce qu’elle avait connu. Etait-ce parce qu’il avait eu une soirée un peu arrosée ou… ? Et apparemment, il n’avait pas assez bu selon lui car il se tournait vers le bar pour se resservir en… vodka. Original. La jeune femme s’avança vers lui, tandis qu’il lui proposait un verre. Non, il fallait qu’elle s’occupe de lui. En gardant la tête froide si possible. Et comment il l’avait appelée là? Lulu? Ouais, complètement torché le mec.

- Kurtis tu devrais…

Un bourré ça n’écoute pas les recommandations. Elle n’avait jamais été témoin de ce genre de situation et elle ne savait pas trop comment s'y prendre. C’était son patron en plus! Sur le coup ça aurait été comique, mais là Lucy n’avait pas la tête à cela. Elle le vit s’excuser auprès de son canapé, ah il était poli. Puis se diriger sur les baies vitrées, verre en main, et dessiner un smiley. Ca va, il avait l’alcool joyeux au moins. La jeune femme s’approcha de lui et fit mine de se prendre au jeu :

- Oui, c’est très réussi. Mais il est très bien tout seul, viens.

Elle le prit par le bras et l’emmena s’asseoir sur le canapé. Ca va, il était docile même si elle avait l’impression qu’il s’approchait un peu trop d’elle. Elle le fit donc s’asseoir et prit place à côté de lui. Elle regardait le verre qu’il tenait encore à la main, il n’était pas vide. Elle fallait qu’elle le lui enlève des mains, sinon c’était sans espoir. Elle prit une profonde inspiration et le regarda dans les yeux :

- Kurtis, tu as bu. Beaucoup trop bu. Il faut que tu arrêtes, donne moi ce verre s’il te plaît.

Enlever le verre d’alcool d’un bourré c’est comme hotter la vie à quelqu’un. Dur dur. Mais il fallait qu’elle le fasse, elle n’allait pas le laisser dans cet état là. Il l’avait tellement aidée, c’était à son tour maintenant. Bon, la partie n’était pas gagnée d’avance. Il fallait qu’elle trouve une autre solution. Pour enlever l’alcool, il n’y a pas d’autre solution que d’attendre. Elle devait le mettre au lit et le forcer à y rester.

- Il est tard, donc je vais te préparer quelque chose de chaud puis on ira dormir, d’accord?

Enfin, « on ira ». Il ira dans sa chambre et elle dans la sienne. La jeune femme se leva puis se dirigea vers la cuisine. Il y aurait bien de quoi préparer quelque chose qui le fasse dormir, genre une tisane. De plus, elle venait de s’apercevoir qu’elle était en petite nuisette. Mince, elle aurait au moins dû mettre une robe de chambre. Bon tant pis, cherchons de quoi apaiser le petit. Ca y’est, elle avait trouvé de quoi faire et maintenant que c’était chaud, manquait plus qu’à le lui donner. Ce qui risquait d’être compliqué. Elle s’assit une nouvelle fois à côté de Kurtis puis lui tendit la tasse :

- Tiens, tu verras c’est très bon.

Pitié, pitié qu’il boit. Sinon, il faudrait qu’elle trouve une autre solution. Bonjour la nuit qu’elle allait passer!

Non pas de poisson rouge ce soir, ni rien d’autre. Il fallait le mettre au lit le plus vite possible même s’il ne le voulait pas. Tant qu’il ne roule pas par terre? Oh et puis encore, il se mettait à faire le chien quand il était bourré? Elle sentait déjà qu’elle n’allait pas dormir cette nuit. Ca serait honteux de le laisser là, à faire on ne savait quoi. Surtout qu’elle ne pourrait pas dormir, d’une par le bruit qu’il ferait et de deux parce qu’elle serait trop préoccupée pour lui. Préoccupée pour lui? Ouais, ça sonnait bizarre à vrai dire. Après tout ce qu’il avait fait pour elle c’était normal non? Bref, il lui prit la tasse, c’était une bonne chose. Mais pour la reposer, maudit Kurtis. La tasse n’est pas pour décorer, mince. Et vu comme il la regardait, elle aurait mieux dû se mettre en robe de chambre. Il fallait qu’il reste un minimum concentré. Bon il y aussi le truc que quand on est bourré on dit que la vérité, mais là tous les hommes l’auraient fait.

- Si Kurtis, tu dois aller dormir. Un lit c’est fait pour dormir.

En quelques sortes. Bah oui, un lit c’est fait pour dormir. Oh il y a des esprits mal tournés par ici. Surtout vers Kurtis. Qu’est-ce qu’elle allait faire maintenant? Il ne voulait pas prendre la tisane ni aller dormir. Et maintenant il disait qu’il ne travaillait pas demain. On aurait franchement dit qu’il retournait en enfance le petit. Du genre, non demain je n’ai pas école alors je peux me coucher plus tard. Lucy se leva à son tour pour lui faire face et pour l’empêcher de faire quoi que ce soit d’étrange qui pourrait lui venir dans la tête. Maintenant il regardait l’heure : oui 1h30, bravo. Une médaille pour le champion!

- Non, on est déjà demain, enfin on est aujourd’hui… Enfin bref! Kurtis… non!

Trop tard, il avait bu d’une gorgée la vodka qui était restée dans le verre. Ah c’est pas vrai. Bon, c’était le dernier verre hein! Il fallait qu’elle aille cacher les bouteilles ou sinon il irait se resservir. Pendant qu’il était un peu distrait, elle lui prit vite fait le verre des mains puis se dirigea rapidement dans la cuisine pour cacher tout ce qui pourrait tenter Kurtis. En parlant de tenter, il fallait qu’elle mette quelque chose par-dessus cette nuisette bon sang! En jetant un rapide coup d’œil, vérifiant que Kurtis ne faisait rien de mal, elle alla dans sa chambre et revint deux secondes plus tard avec une robe de chambre. Voilà qui était mieux. Oh mince, il était dans la cuisine. Mauvais signe. Elle alla vers lui et l’empêcha de poursuivre sa recherche en le poussant vers le salon.

- Tu comptes faire quoi si tu ne veux pas dormir alors?

Elle resterait avec lui s’il le fallait. Heureusement que la petite Lucy était patiente, ils y en auraient déjà qui auraient pété des plombs. Peut être que si c’était d’autres personnes qui étaient dans cet état, ça aurait été différent. Mais là c’est lui, c’était Kurtis.

- Tu ne veux pas me faire plaisir? Et aller dormir?

Sa demande était un peu sans espoir, mais on verrait bien ce qu’il allait lui répondre. De toute façon, il ne tiendrait pas jusqu'au matin. Il tomberait d'un moment ou un autre dans les bras de Morphée. Mais ce moment, quand allait-il arriver? C'est vrai qu'il n'avait pas l'air très fatigué. Et sur le coup, la demoiselle non plus. Tout ce remu ménage l'avait complètement réveillée. C'était toujours comme ça chez lui? Ou juste ponctuel? Et puis, il était rentré comment à la maison? Il n'aurait pas pu prendre le volant dans cet état! Pleins de questions tournaient autour de la jeune femme. Elle remarqua aussi que Kurtis était rouge. Un vrai rubicon. C'était sans doute sous l'effet de l'alcool, il fallait qu'il s'aère.

- Kurtis, déboutonne ta chemise tu vas étouffer.

C'était bien connu, l'alcool augmente la rapidité du sang ce qui donne un surplus chauffant. Bon il n'allait pas se mettre à poil devant elle, mais au moins qu'il respire un peu. En fait, l'idéal aurait été de prendre une douche, mais comment dire? Non.

Manger une tarte aux pommes? Ouais bien sûr, elle allait se mettre à cuisiner à presque 2h du matin. Et le chocolat chaud, bah tant pis qu’il boit la tisane qu’elle lui avait préparé. La pauvre était encore sur la table basse. Elle ne devait plus servir à rien, elle était sûrement froide à présent. Et voilà qu’il repartait sur son délire des poissons rouges. C’était son animal préféré ou quoi? Bon, elle lui offrirait ça pour son prochain anniversaire alors, ça lui fera des souvenirs. Ah tiens, il avait remarqué qu’elle avait enfilé une robe de chambre. Mécontent en plus le bonhomme. Elle n’allait pas non plus se mettre à lui faire un trip tease?

- J’ai mis ce truc comme tu dis, parce que j’avais…froid.

Elle n’allait pas lui dire que c’était pour stopper ses pulsions masculines oh combien dérangeantes. C’était même presque gênant. Elle l’avait tellement vu sérieux, ordonné, classe et tout, que le voir bourré maintenant, changeait toute sa vision des choses. Mais même pas sa robe de chambre arriva à lui faire oublier toutes ces choses vu la remarque qu’il lui avait lancé. Oui, bon c’est bon elle avait compris qu’il voulait quelque chose au lit. Et c’était loin d’être dormir. Les hommes…

- Kurtis, tu dis n’importe quoi. Tu n’as pas toute ta tête…

Et voilà qu’elle lui dit de s’aérer un peu, et il trouve encore quelque chose à travers. On ne pouvait plus faire de remarques sans que ça vire à un côté spécial ou quoi? Et l’instant d’après, Lucy se retenu de ne pas éclater de rire. Il voulait lui faire un trip tease privé? Il n’arrivait même pas à se défaire de sa cravate, il était mal parti. La jeune femme se mordit la lèvre inférieure pour ne pas partir dans un fou rire. La scène était vraiment plus que comique. Son patron, bourré, en train d’essayer de se déshabiller de manière sexy devant elle. On aura tout vu! Si demain il ne se rappelait plus de rien, elle se ferait un plaisir de tout lui raconter. Non c’était méchant, quoique il en rirait peut être. Elle reçut alors cette cravate sur la tête, après qu’il eut enfin réussi à l’enlever, non sans faire une remarque et à pousser la chansonnette. Combien de verres il avait bu pour être dans cet état sérieusement? Il ressemblait de très loin au PDG de JI². C’était le Kurtis fou là. L’alcool prend souvent des tournures incroyables, et là c’était l’exception qui confirmait la règle. Elle prit le soit disant « cadeau » de Kurtis, le retirant de sa tête puis le posa sur le canapé d’à côté.

- C’est très gentil de ta part, merci beaucoup.

Bon, qu’allait-elle faire maintenant? Impossible de le mettre au lit pour dormir, de lui faire boire quelque chose d’apaisant. Combien de temps duraient les effets? Aucune idée. Elle n’en avait strictement aucune idée. Il n’avait pas encore déboutonné sa chemise et il demeurait rouge. Il fallait tout qu’elle fasse elle-même? La demoiselle s’approcha donc de lui et avant de l’aider à se défaire de ce vêtement elle prit la peine de l’avertir en prenant un air sérieux, on ne sait jamais :

- N’aies pas l’esprit mal tourné, je ne vais pas me rincer l’œil ni quoi que ce soit. Je veux juste que tu respires et que tu te sentes mieux.

Elle lui déboutonna alors quelques boutons et ouvrit un peu la chemise. Mon dieu, il était rouge aussi sur le torse, était-ce normal? Pitié qu’il ne sorte pas quelque chose du genre oh je suis rouge comme un poisson rouge! C’était peut être normal. Elle ne savait pas trop des conséquences d’un trop plus d’alcool. Fallait peut être qu’elle aille chercher sur internet. En plus, elle qui lui avait dit deux minutes auparavant qu’elle avait froid, elle commençait à avoir chaud maintenant à force de réfléchir et d’essayer d’aider Kurtis. Oui, elle voulait l’aider. Et pendant qu’elle pensait à tout ça, elle ne réalisa pas qu’elle était encore tout près du patron et qu’elle avait gardé ses mains sur son torse. Mais elle fit bien vite de le remarquer, puis se détacha d’un coup sec. Si la situation aurait été différente et que Kurtis n’était pas bourré, ses pommettes auraient vite virées au rouge. Elle se remit de ses « émotions » puis reposa ses yeux sur Kurtis.

- Qu’est-ce que tu as fait ce soir pour te retrouver dans cet état? Tu as rencontré une femme ou… ?

Normal qu’elle est direct cette pensée, c’était la première chose qui lui traversait l’esprit. Et qui la préoccupait. Ben oui, le patron est un grand séducteur. Et si une femme avec des mauvaises attentions l’avait emballé dans ce délire ou autre… Enfin bref. Elle s’inquiétait la petite Lulu! Et si elle mettait de la musique? Musique douce et calme. Pour le calmer. Ca aidait pour endormir les enfants non? Alors pourquoi pas Kurtis. Lucy attrapa la télécommande l’Hi-fi puis appuya sur le bouton on. Bingo, une belle musique douce. Allez Kurtis endors toi!

Un mec? Oula, ça allait un peu au-delà de ce qu’elle s’était imaginée. Non, ouf c’était un pote du lycée. Ca remontait à loin pour lui alors. Les bonnes retrouvailles, ça fait toujours plaisir. Et là, il ne s’était pas retenu pour boire, boire et encore boire. Il ne savait pas arrêter ou quoi? C’était peut être sa faiblesse l’alcool. Elle n’en savait trop rien. Et elle lui demanderait ça quand il sera plus sobre. Une fois qu’il aura dormi! Même pas la musique qu’elle lui avait mise le faisait quelque peu somnoler. Ouais bon, elle n’était pas très distrayante et un peu nulle, il avait raison. Mais bon, on fait avec les moyens du bord. Et comme par hasard, quand on entend musique on entend danse! Et que fit Kurtis? Danser pardi. Une belle valse. Lucy se laissa faire car tant qu’il ne boit pas, il n’y a pas de problème. Ils firent deux ou trois tours sur eux même jusqu’à que le patron s’arrête et s’allonge sur le canapé. La demoiselle le suivit de suite, s’agenouillant à côté.

- C’est ce que j’essaye de te dire depuis tout à l’heure. Il faut que tu te reposes.

Mission accomplie! Il était au moins couché, si ce n’était pas une bonne nouvelle ça? Elle le laissa faire à sa guise, fermer les yeux et respirer profondément durant un petit moment. Jusqu’à qu’il sorte cette phrase. Comment ça arrêter de picoler un jour ou l’autre? Il le faisait souvent? Ce n’était pas occasionnel? Cette phrase eut le don de préoccuper la jeune femme. Etait-il… alcoolique? Non, c’était bien un trop grand mot pour Kurtis. Ca ne pouvait pas être possible.

- Qu’est-ce que tu veux dire par là? Tu bois… souvent?

Il fallait qu’elle le sache, si c’était un problème récurrent chez lui. Elle devait peut être l’aider différemment ou autre. Enfin bref, le coup de je reste allonger tranquillement sur le canapé ne dura pas longtemps puis qu’il ouvrit d’un coup les yeux sortant… une nouvelle connerie. Comme par hasard. Ca va, elle commençait à être habituée la petite. Il la faisait quand même sourire avec les débilités qu’il sortait.

- Kurtis Jericho c’est très beau.

Bah ouais, ça sonnait bien. Ca faisait bien PDG. Ca lui allait bien à lui quoi. Même si dans cet instant même, on ne pouvait pas le comparer à un patron mais plutôt à un idiot bien bourré.

- Je t’achèterai un poisson rouge alors, et tu l’appelleras comme tu voudras. Albert dans ce cas là.

Autant lui faire plaisir, il ne fallait pas trop aller en contre-sens avec lui. Et vu que la musique ne lui plaisait pas. Soit, elle allait l’enlever de suite. Elle attrapa la télécommande et bam, plus de musique. Magie! Il était toujours allongé sur le canapé et elle agenouillée à côté de lui. Etrange scène. Elle continuait de le fixer, avec un petit sourire aux lèvres. On aurait dit une mère et son enfant. Sauf que là c’était complètement différent.

- Tu vois que tu es bien comme ça, allongé.

Il avait l’air de rester calme et tout, tant mieux. L’alcool commençait peut être à descendre. Il aurait un bon mal de tête demain matin. Prise d’une certaine envie, elle se mit à lui toucher les cheveux. Un simple geste affectif. Et elle nota qu’il transpirait. Qu’est-ce que ça transpire un homme, avec le moindre effort!

- Tu devrais aller prendre une douche.

Et au passage, ça le réveillera peut être de sa folie alcoolique.

Oui Lucy était un joli prénom et elle en était consciente. Enfin quelque chose dont ses parents avaient réussi à s’entendre. Et contente de savoir que Kurtis l’appréciait aussi. Simple, court et chouette.

- Merci!

Ah nom de dieu, il venait de l’écouter là? Elle venait de lui demander de prendre une douche et il n’avait pas rouspété! Yeah, mais c’est qu’on progresse par ici. La demoiselle était fière de son avancée. Au bout d’une demi-heure elle avait au moins réussi à lui faire quelque chose de décent. Elle allait continuer sur cette voie, il le fallait. Oui c’est cool les douches, surtout quand on pue. Enfin, on dit ça on dit rien, mais Kurtis ne sentait pas tout à fait la rose. Plutôt à l’alcool mélangé à quelque chose de bizarre. Bref, elle n’avait pas trop envie d’analyser en quoi son patron sentait donc elle se leva à son tour, restant tout de même à proximité de peur qu’il ne sache plus comment tenir debout. Ca va, il tenait sur ses deux pieds.

- Si tu n’en reviens pas vivant, ça sera moi à qui il faudra consoler.

Oui, c’était un peu la seule femme ici et puis après tout ce travail pour juste l’emmener à la douche, c’était bête qu’il y reste. Non, elle ne faisait juste que jouer à son jeu. Qu’il n’aille pas penser d’autres choses. Elle le suivit des yeux tant qu’il traversait le couloir, pour voir s’il n’allait pas ailleurs pour se planquer avec une autre bouteille ou s’il tomberait subitement. Mais non, comme un champion il arriva à destination et après ben… elle ne savait plus rien. Il allait quand même se laver tout seul, non? Pas besoin d’aide pour ça. Espérons qu’il ne se fracasse pas la figure contre le sol, ça serait bête. Non ça va, elle entendait la douche. En attendant son patron, Lucy se reposa sur le fauteuil mettant ses mains sur son visage. C’était vraiment une drôle de situation qu’elle avait subi. Digne d’une scène de théâtre ou d’un film. Mais c’était bel et bien la vérité. Et le fait était pourquoi elle s’y prenait tant à cœur pour aider le malheureux Kurtis. Aucune idée. Elle ne saurait le dire à l’instant même, tellement de choses passaient dans sa tête. C’est ce même homme qui la sortit de ses pensées. Il voulait encore sa tarte? Lucy releva la tête vers la voix. Ah, il n’avait même pas pris la peine de se rhabiller. Sympathique et encore tout dégoulinant. Bon ça va, il avait pris une pomme. Mais oh là non, il s’approchait du bar. La jeune femme se leva d’un bond, prête à lui barrer le passage, mais cela fut plus simple car le patron lui-même s’arrêta avant qu’elle n’ait pu faire quoi que ce soit. Et vu la tête qu’il tirait, ça n’allait pas fort. Elle s’approcha de lui doucement :

- Est-ce que ça va Kurtis?

Bien sûr qu’il n’allait pas bien, question idiote mais qu’on pose tout le temps. Elle l’emmena une nouvelle fois sur le canapé, puis l’installa avant de dire :

- C’est ta tête non? Je vais aller te chercher de l’aspirine.

Les effets de l’alcool et le bon mal de tête. Qui n’a jamais connu ça? Bon, exécution, la demoiselle se leva en direction de la salle de bain de Kurtis. Il devait bien avoir ça quelque part. En passant, elle remarqua le bazar qu’il avait fait en mettant toutes ses affaires par terre. En faisant un effort pour ne pas marcher dessus, Lucy trouva enfin ce qu’elle cherchait. Elle prit un cachet, retourna dans la cuisine pour prendre un verre d’eau et se dirigea enfin vers le malade. Elle lui tendit le médicament et le verre :

- Tiens, vas-y bois. Tu te sentiras mieux après.

Une vraie maman poule n’est-ce pas? Non mais Lucy était la gentillesse incarnée, il ne fallait pas lui en vouloir. Surtout que là c’était Kurtis qui se trouvait devant elle. Ca change tout? Un peu.

- J’exige une augmentation! Je suis en train de travailler en heures extras là.

Dit-elle en étouffant un petit rire. C’était une blague bien entendu, espérons juste que sous l’effet de l’alcool il le prenne à mal. Mais non, même bourré c’est un ange le petit.

- Je plaisante, hein. J’aime bien t’aider.

Elle lui fit un petit sourire, puis reporta son attention à autre chose dans l’appartement. Elle avait l’impression qu’elle l’observait un peu trop. Alors elle se mit à regarder le canapé qui était devant eux. Très intéressant à vrai dire.

Oui, on connaît l’histoire. On se réveille pas chez où on est censé être mais chez quelqu’un d’autre. Et en l’occurrence Kurtis, ça devait être une femme. Sans aucun doute même. Ouais, elle ne voulait pas trop connaître les détails en fait. La phrase qu’il laissant sous-entendre suffisait amplement. Elle lui fit un petit sourire quand il lui dit que son augmentation serait amplement méritée. Bon, elle savait que c’était une blague mais au moins elle savait qu’elle s’occupait bien de lui. Et voilà qu’il se remettait à parler des filles. Et c’était logique qu’elles l’aidaient à le mettre dans un lit bien sûr. Elle avait compris, même sans qu’il termine sa phrase. Elle était donc la seule comme ça? Ouais, ça revenait bien à sa phrase monotone et qu’on connaissait toutes et tous :

- C’est parce que je suis différente.

A croire qu’elle allait continuer à le répéter tant qu’il ne l’a pas comprise. Elle lui fit un léger sourire un peu rêveur puis se remit à observer le canapé devant elle qui était toujours aussi…intéressant. Ca va, il avait l’air de dessoûler. Lentement mais sûrement. C’était bon signe, elle allait peut être pouvoir bientôt se coucher qui sait? Mais il y avait un truc qui clochait, un silence étrange était apparu. Elle sentait qu’on la regardait, enfin Kurtis la regardait. La jeune femme tourna prudemment le regard vers on patron et oui effectivement, il la regardait. D’une manière dont il ne l’avait jamais regardé. Lucy soutint son regard, maintenant le silence et attendant surtout un quelque signe du jeune homme. D’ailleurs il ne tarda pas à le faire. Il se leva et en résumé, s’approcha un peu trop d’elle. Il passa ses doigts dans ses cheveux et en profita avec l’autre de la rapprocher de lui par la taille. Il jouait à quoi là? La jeune femme se laissa faire, mais ses sourcils se froncèrent légèrement. Elle était censée faire quoi là? Il était soûl là, c’était l’alcool qui l’attrapait obligé. Il n’était pas consentant de ce qu’il faisait. Si? Et qu’est-ce qu’il lui sortait là? Elle lui plaisait? Et surtout le pire, c’est qu’il était vraiment trop près d’elle. Non, elle ne pouvait pas le laisser faire ça. Même si indirectement, elle n’était pas très contre. Mais là, il avait bu, il n’était pas dans son état normal. Et puis… Quelque chose lui vint à l’esprit. Elle resta aussi près de lui, sans reculer ni avancer, juste le regardant dans les yeux sans ciller :

- A combien de femmes tu as dit ça?

Elle ne voulait pas être une de plus sur la liste de Jericho. Compréhensible pas vrai? Elle attendait patiemment sa réponse, sans bouger, ni ciller des yeux. Elle sentait son souffle près d’elle, et bizarrement ça la rassurait. A vrai dire, elle était bien là.

Il n’avait pas compté. Et il disait ça tout tranquille et pépère le type. Elle était un peu déçue à vrai dire. Elle ne s’attendait pas à grand-chose vu qu’il était bourré mais un minimum aurait été le bienvenu. D’ailleurs, elle le fit bien remarquer sur son visage, car son expression changea et elle baissa les yeux vers le sol. Le nombre de femmes inimaginable qui avaient dû passer avant elle : souvent pour son argent et sa renommée. Et alors qu’elle ne voulait rien de tout ça. Elle resta proche de lui, puis sentit d’un coup sa main passer sur sa joue. Instinctivement, elle releva ses yeux sur lui. D’accord, il était sincère. Et il avait l’air sérieux. Mais ça changeait quoi sérieusement? Il croyait qu’elle allait lui sauter dessus maintenant? Dans ses rêves oui. Elle le sentit vouloir s’approcher encore plus près qu’il ne l’était déjà, mais se raviser ensuite. Bon choix Kurtis, si tu ne voulais pas te prendre la tarte que tu voulais tant dans ton visage. Non, mais il était plutôt mal en point. Encore une fois. C’est vrai que l’aspirine et l’alcool n’allait pas très bien ensemble. Elle aurait dû y penser plus tôt, mince. Elle aggravait peut être sa condition. Elle s’écarta de lui pour le laisser maudire à sa guise, tout en l’observant. Seule solution : le lit. Et il avait fait cette déduction tout seul comme un grand. C’est qu’il commençait à prendre de sages décisions. Tant mieux.

- Oui va te coucher, il vaudrait mieux.

Elle le sentit se baisser et lui faire un bisou sur la joue. Après qu’il avait été à deux doigts de l’embrasser, c’était qu’un petit bisou? Il changeait vite de perception le patron. Il avait peut être sentit que Lucy s’était en quelques sortes « refroidie » après sa réponse. Il y avait de quoi. Elle lui accorda un petit sourire puis le regarda s’éloigner vers le fameux couloir, jusqu’à qu’il… s’arrête et il fasse demi tour? Oh non c’est pas vrai, il voulait quoi encore. Ah oui, la pomme très important c’est sûr.

- Oui c’est sûr qu’on est en pleine jungle ici.

Ca lui avait un peu échappé à vrai dire. Elle ne voulait pas être méchante, mais là maintenant qu’elle regardait la montre il était presque 3h du matin. Et même si elle n’avait pas cours le lendemain, elle sentait peu à peu la fatigue la gagner. Et sans le vouloir, elle avait répondu un peu précipitamment. Etait-ce dû à sa remarque à combien de femmes de tout à l’heure? Ou le fait qu’il fasse sans cesse des allers retours à en donner le tournis? Elle n’en savait trop rien. En plus, il commençait à lui parler des Tortues Ninjas. Il était vraiment à l’Ouest, il ne savait même plus ce qu’il disait ou faisait. Par politesse, Lucy l’écouta jusqu’à la fin. C'est-à-dire jusqu’à son idée des ragondins de je ne sais où. Enfin bref, une débilité encore.

- Et on les appellera comment? Les Ragondins Tireurs d’Arc? Tu proposeras ça à ton équipe, ils vont adorer.

Ironie, espérons qu’il ne se mette pas à appeler son équipe maintenant pour leur faire partager sa découverte. Non, il valait mieux le mettre au lit. Et là, ça sentait l’obligation totale. La jeune femme décroisa ses bras puis s’avança d’un pas décidé vers Kurtis. Elle attrapa la pomme à moitié terminée puis de l’autre main libre, le bras de son patron :

- Allez Kurtis, c’est pas tout mais tu devais aller dormir. Tu t’en rappelle?

Elle marqua une petite pause, tant qu’elle essayait d’arriver jusqu’au couloir avec lui. Au passage, elle jeta la pomme à la poubelle. Elle reprendrait sa liberté, RIP. Tout en continuant à l’amener vers sa chambre, elle ajouta :

– Et quelle coïncidence, moi aussi je vais aller dormir. Si c’est pas beau tout ça.

Complètement. Elle arriva enfin dans la chambre du logeur, puis le fit asseoir sur le lit. Mince, il était encore en peignoir. Oh c’est pas vrai. Elle ferma les yeux puis soupira un bon coup avant de les rouvrir :

- Bon, tu dors avec ton peignoir ou sans, ça m’est égal. Mais tu dors.

Qu’est-ce qu’il faisait chaud dans cette chambre! Lucy alla rapidement entrouvrir la fenêtre pour laisser entrer un peu d’air frais. Et par la même occasion, elle hotta sa chemise de chambre. Et puis zut pour Kurtis, hein. Elle était bien mieux en nuisette.

- Bon et bien, bonne nuit Kurtis. Et je te dis à demain!

Et il tomba vite dans les bras de Morphée. Ah elle en avait marre d’avoir raison la petite Lucy. Mais bon, c’est la vie. Après l’avoir observé rien que deux minutes dormir (c’était mignon, ça valait le coup), elle quitta la chambre pour rejoindre la sienne. Elle se laissa tomber dans son lit, puis s’endormit aussi tout de suite. C’est qu’ils étaient crevés les petits loups. Lucy quant à elle, eut un sommeil léger. Elle se réveilla sous les rayons du soleil qui perçaient les volets. Elle jeta un coup d’œil au réveil : 11h33. Wow, elle en avait fait de la dorlote. Elle s’assit sur son lit puis commença à se réveiller tout en repensant à hier soir. Enfin, à ce matin même si on voulait être plus précis. C’était vraiment une drôle de soirée. Elle en avait appris des choses. De une, Kurtis abusait sur l’alcool. De deux, elle lui plaisait. Et de trois, bah… Rien. Elle avait quand même noué de sacrés liens pendant cette soirée avec son patron. Il devait être dans un état pas possible ce matin. S’il était déjà réveillé. C’est ce qu’elle alla voir de suite, elle se leva de son lit, se rafraîchit vite fait dans sa salle de bain puis aller jeter un coup d’œil dans la chambre voisine. Il dormait encore apparemment. Bien, elle allait lui préparer quelque chose.

Elle alla dans la cuisine puis se mit à préparer le petit déjeuner, pour elle et pour Kurtis. Bah oui, tant qu’on y est. Elle attrapa aussi la boîte d’aspirine, elle en aurait besoin. Enfin, le PDG en aurait besoin. Quand elle eut finit, elle disposa tout ça sur un plateau puis se dirigea dans la chambre de Kurtis. Elle entrouvrit la porte doucement. Ah ça bougeait là dedans. Il devait sûrement être réveillé. En effet, les yeux à moitié ouverts et une bonne mine de gueule de bois.

- Toc, toc. Je peux entrer?

Lucy entra donc avec précaution avec le plateau remplit de bonnes choses puis se mit à avancer jusqu’à son patron. Elle ouvrit ensuite légèrement les volets, qu’il puisse s’habituer à la lumière du jour puis s’assit sur le rebord du lit en l’observant avec un sourire :

- Bonjour patron, bien dormi?

Question idiote, il devait avoir super mal au crâne ouais. Et est-ce qu’il se souvenait de tout ou pas? Bonne question. Fallait-il lui rafraîchir la mémoire? Sur ce qu’il lui avait dit en particulier…? Bon, pour l’instant, il fallait qu’il se réveille correctement. Allez Kurtis, debout là dedans!

- Euh… J’ai pensé que tu aimerais bien avoir ton petit déjeuner au lit vu le mal de tête que tu dois avoir.

Et du même coup, elle avait amené le sien aussi. Un petit déjeuner ensemble dans un lit, si c’était pas mignon tout ça? La jeune femme lui agita le cachet d’aspirine devant les yeux avec un petit rire. Il en avait sûrement besoin.

- C’était une sacrée soirée hier.

Ca on pouvait le dire! Elle n’en vivait pas des comme ça toutes les nuits. En y repensant, c’était quand même une sacré anecdote à raconter. Mais comme c’était Kurtis Jericho le bourré, mieux valait s’abstenir.

Il avait l’air totalement à l’ouest le petit Kurtis. D’accord, il avait mal au crâne vu la cuite qu’il s’était prise hier ça semblait normal. Mais aussi, il avait l’air d’être complètement perdu. Et surtout, elle voyait bien qu’il se demandait pourquoi elle avait amené le petit déjeuner au lit. Un gros blackout. C’était la seule raison. Oh et puis zut Kurtis fait un effort, il s’en était passé des choses hier soir! Même si Lucy voulait en oublier quelque unes, il y en par contre d’autres qu’elle ne pouvait pas. Qu’est-ce qu’il s’était passé? Oh pleins de choses. Elle devait lui en faire un résumé? Elle commencerait par où, hein? Les poissons rouges ou le fait qu’il voulait à tout prix la mettre dans son lit? Ah bah tiens, il avait eut la même idée on dirait. Elle le regarda avec un petit sourire en coin, tandis qu’il essayait tant bien que mal de s’exprimer avec ses mains. Ca va, elle n’était pas née de la dernière pluie la demoiselle. Elle savait très bien de quoi il parlait.

- Non je te rassure, on ne l’a pas fait. Mais par contre, tu en avais très envie.

A quoi bon le cacher? Il ne se souvenait de rien, donc autant lui exposer tout ce qu’il avait fait durant cette petite soirée avec la jeune femme. Le voyant s’effondrer sur le coussin, elle attrapa une nouvelle fois un cachet d’aspirine, puis un verre d’eau et le tendit à Kurtis en lui tapotant le bras :

- Si tu veux je te fais un résumé de ce qu’il s’est passé, mais d’abord prends ça.

Il fallait mieux qu’il soit en état de l’écouter, car il y aurait peut être des choses qu’il aurait du mal à concevoir. La jeune femme prit une profonde inspiration, puis commença :

- Alors en gros, tu es arrivé ici à 1h30 du matin en chantant je ne sais quoi. Heureusement, je ne dormais pas donc je me suis levée pour aller voir si tout allait bien, puis je t’ai trouvé dans le salon complètement…torché. J’ai maintes et maintes fois essayé de te mettre au lit, de te cacher l’alcool pour ne pas que tu en reprennes et j’en passe. Tu as sortit beaucoup de débilités je dois te l’avouer, et j’ai découvert que tu avais un petit faible pour les poissons rouges.

Et ce n’était pas le seul petit faible qu’il avait. Devait-elle lui en parler? De tout ce qu’il lui avait dit. Quand il s’était retrouvé très près d’elle et sur le point de l’embrasser? Là, tout de suite ça compliquait les choses. Oh Kurtis, pourquoi tu ne t’en souviens pas là! Un peu hésitante, la jeune femme décida quand même de se lancer :

- Tu m’as… aussi avoué des choses. Euh, si je te cite mot pour mot c’est : « Tu sais que tu es loin de me laisser indifférent? »…

Elle marqua une pause le fixant intensément.

- Et tu avais bien franchi la distance… physique. Je ne sais pas si c’est à cause de l’alcool, mais… voilà.

Et qu'il avait bien failli l'embrasser. Elle ne le culpabilisait en aucun cas, il voulait savoir et bien tiens. Elle lui disait tout. C’était peut être aussi pour savoir qu’est-ce qu’il en pensait maintenant qu’il était sobre et avait quasiment toute sa tête. C’est vrai que cette scène avait bien fait réfléchir la demoiselle. Sur le coup, elle s’était sentie tellement bien avec lui là. Dommage qu’il était soûl. Mais… c’était son patron! Pourquoi elle se mettait à penser ce genre de choses? Elle n’en savait trop rien.

- Euh, je suppose que tu voudrais prendre ton petit déjeuner seul… Je… J’y vais, si tu as besoin d’aide je suis dans la cuisine.

Il avait sûrement besoin d’être seul, et elle le comprenait. Surtout que là elle débarquait d’une telle façon qu’on aurait dit un couple. Enfin bref, c’était comme il le sentait.

Bon apparemment, il voulait qu’elle reste. Il voulait peut être s’expliquer ou un truc du genre. Elle se laissa donc retomber doucement sur le lit en posant les yeux sur lui. Et oui, il allait s’expliquer. Enfin, c’était ce qu’il semblait. Pour être précis, il s’excusait. En fait, il y avait bien de quoi s’excuser. Ce n’était pas non plus une partie de plaisir que de le surveiller à droite à gauche comme un enfant complètement surexcité. Et comme Lucy avait un cœur gros comme ça, et ben avec elle, les excuses ça passe très bien.

- Oui, ne t’inquiète pas je ne t’en veux pas. On peut tous plus ou moins avoir ce genre de périodes et je le conçois très bien.

Elle disait des périodes, mais était-ce un problème récurrent? Fallait-il le questionner sur ce sujet là? Hum, il ne valait mieux pas pour l’instant vu comment il était mal à l’aise pour la suite. Oui, la suite. Là elle lui avait décrit cette scène qu’elle n’arrivait pas à enlever de sa tête. Elle le revoyait encore et encore. Et maintenant, il s’expliquait. Et il était sobre. Elle pourrait le croire à présent. Elle resta donc en silence, l’écoutant patiemment. Il avait donc une attirance physique pour elle. Comme quoi l’alcool nous fait dire tout ce qui se trouve au plus profond de nous. Lucy ne savait pas trop comment réagir à cela. Elle ne serait même pas surprise si d’un coup ses joues se mettaient à s’enflammer. Bon, calme-toi Lucy. Ce n’était rien. Enfin, presque. Ah mon Dieu, elle se trouvait dans une situation complètement embarrassante là. Qu’allait-elle lui répondre. Elle posa ses yeux vers le sol, comme si le parterre allait indirectement lui donner une réponse. Mais bien sûr. Il fallait qu’elle se débrouille toute seule. Comme une grande. Kurtis avait fait sa part de responsabilités, maintenant c’était à elle de le faire. C’est partit!

- Kurtis, je veux que tu saches que en aucun cas je n’ai eu peur ou quoi que ce soit. Je… je vais être honnête avec toi, vu que tu viens de l’être avec moi. Ca ne me dérangeais pas du tout que tu sois si près de moi… Bien au contraire.

Qu’est-ce qu’elle était en train de lui raconter là? Ouais bon, maintenant qu’elle y était, elle n’allait pas arrêter pour autant :

- En fait, j’étais bien. Je me sentais bien et… voilà. Je pourrais peut être même reprendre ta phrase : tu es loin de me laisser indifférente, Kurtis.

Bam! Quelle connerie elle venait de sortir. Bon dieu, mais elle parlait à son patron là! Il fallait que quelqu’un l’empêche de parler. Qu’allait-il en penser le PDG? Même si maintenant ils étaient un peu sur la même « longueur d’ondes », ce n’était pas loin d’être gênant. Lucy se mordit la lèvre inférieure, puis commença à fixer autre chose que Kurtis. Il fallait qu’elle se calme. Maintenant qu’elle l’avait dit elle ne pouvait plus faire marche arrière. Elle devrait peut être s’en aller là. Mais non, elle continuait de rester assise à fixer tout sauf Kurtis.

- Excuse moi si je me suis montrée un peu trop directe…

C’était l’instant révélations ou quoi? On dirait bien. Maintenant il ne fallait plus qu’attendre la réaction de notre cher patron, ce que la demoiselle commençait à redouter.

C’était un peu bizarre cette situation à vrai dire. Deux personnes qui s’attiraient mutuellement, en train de s’avouer leurs ressentis comme s’ils parlaient de la pluie et du beau temps. Scène étrange. Mais Lucy se sentait un peu mal à l’aise après tout ça. Qu’était-elle censée faire? Elle s’était sentie presque obligée de lui avouer certaines choses à son égard. Parce que lui avait fait de même? Ou parce qu’elle l’avait voulu? Un peu des deux en fait. Cela faisait depuis quelques jours qu’elle s’étonnait à l’observer discrètement. Lorsqu’il rentrait du boulot, ou juste le matin quand il lui disait bonjour. C’était vrai que entre le Kurtis sobre et le Kurtis bourré, il y avait une sacrée différence. Elle ne pouvait en aucun cas le nié. Mais au moins, cette facette de lui, lui permit de voir qu’il n’était pas parfait et qu’il avait ses défauts comme tout le monde. Elle apprenait à le connaître peu à peu et c’est ça qui lui plaisait.

- C’était plutôt amusant en fait.

En y repensant, si elle avait filmé cette soirée, ça aurait été extra. Revivre les moments où son patron enchaînait débilité sur débilité alors qu’elle essayait en vain de le mettre au lit. Une vraie scène de ménage tout à fait comique. Tiens, il parlait d’augmentation. N’avait-elle pas déjà fait cette remarque lorsqu’il n’avait plus toute sa tête? Si si, et il lui avait répondu qu’il lui donnerait une augmentation. Ah la blague. Elle n’avait besoin d’aucune augmentation, elle avait juste fait ce qui lui semblait juste dans ce cas : aider le pauvre Kurtis. Bon, là il redevait sérieux. Elle le vit se positionner correctement, gardant sa couette en main. Oh, elle sait se retenir la petite. C’est une femme voyons, les hommes c’est différent mais une jeune femme comme elle quand même. Elle l’écouta parler, oui il résumait très bien le tout. Et ça sonnait très bizarre. Cocasse, c’était bien le mot. Et de quoi? Qu’est-ce qu’elle voulait? Comment ça qu’est-ce qu’elle voulait? Bon dieu, il lui demandait de choisir là ou quoi? Tenter avec lui ou laisser tomber. C’était une question piège? Car ça en avait bien l’air malheureusement. Lucy releva les yeux vers lui, le fixant pendant un bon moment. Que répondre?

- C’est un ultimatum?

Ca en avait tout l’air aussi. Résumons. Elle avait 21 ans et lui 35. Il était son patron et elle son employée. Elle vivait depuis peu chez lui et depuis les dernières nouvelles : ils s’attiraient mutuellement. Génial. Bon, il fallait qu’elle réponde à sa question là. Jamais elle n’aurait cru que ce matin, elle allait faire face à ce genre d’évènement. En plus, elle était encore en nuisette, à peine coiffée, si ce n’était pas romantique. Elle restait assise sur le coin du lit, étant quand même un minimum à côté de Kurtis. Sans réfléchir, elle se pencha vers lui, de façon à se retrouver comme ils étaient hier soir. Tout près. Puis en une fraction de seconde, elle déposa ses lèvres sur les siennes pour y laisser juste un tendre baiser. Mais elle se ravisa vite. Non, elle ne voulait pas! Elle ne savait donc pas se contrôler? Elle rouvrit ses yeux, puis se détacha rapidement de Kurtis, reprenant sa position antérieure. Elle venait de l’embrasser là, pas vrai? Elle venait d’embrasser son patron? Mais tout s’inversait ou quoi? Hier lui, maintenant elle. Sauf que là, elle n’avait aucune excuse, elle était sobre! Lucy essaya de reprendre vite ses émotions. Non, elle ne pouvait plus rester ici, dans sa chambre, maintenant.

- Je… euh… je vais aller me changer. Enfin, je vais d’abord prendre mon… petit déjeuner.

Dit-elle en se levant rapidement du lit de Kurtis, sans essayer de croiser son regard. Elle sortit ensuite de sa chambre, se dirigeant vers le cuisine. Merde, le petit déjeuner était dans sa chambre! Oh c’est pas vrai. Se maudissant à voix basse, la jeune femme retourna dans la chambre de son patron puis attrapa d’un geste rapide et un peu maladroit les aliments dont elle avait besoin, puis retourna dans la cuisine, déposant tout son petit paquet sur une table. Elle s’arrêta un instant, reprenant son souffle. Elle ferma ses yeux puis respira profondément. Elle jouait à quoi là au juste? Elle ne pouvait pas faire ça avec son patron. Non. Elle essaya de se ressaisir, puis commença à prendre son petit déjeuner. Enfin, elle fit semblant car en vrai, elle en avait presque perdu l’appétit.

Elle avait vraiment perdu l’appétit. Elle tournait et retournait ses pauvres céréales dans son bot de lait. Comme elle avait une fois tourné le malheureux fondant au chocolat jusqu’à lui en donner le tournis. Et cette dernière fois, elle était avec Kurtis, dans un beau restaurant et… Oh pourquoi pensait-elle à ça maintenant? Elle venait de l’embrasser, enfin c’était très léger, mais rien que le fait d’avoir oser faire le geste c’était déjà trop pour elle. Ah tiens, le voilà qui revenait. Avec son peignoir, comme hier soir. Il s’approcha d’elle pour lui déposer un baiser sur le front. Et rien qu’à ce contact, elle ferma un instant les yeux. Et si, justement. Elle se cassait vraiment la tête. Pour ce genre de choses? C’était bien plus complexe que ça quand même. Il n’avait pas l’air de trouver ça important le patron! Mais la jeune femme se retint de dire quelque chose puis continua de martyrisé son bol de céréales. Oui, qu’il aille s’habiller, ça vaudra mieux. Pendant ce temps, Lucy arrêta son manège puis commença à manger son petit déjeuner à contre cœur. Sa tête était en pleine fusion. Devait-elle aller s’expliquer à Kurtis? Qu’est-ce qu’elle pourrait lui raconter de plus sérieusement? Et en plus, elle n’allait pas rester comme ça avec lui vu qu’ils cohabitaient. Oh, elle voulait arrêter de réfléchir mais malheureusement ses pensées se tournaient et se retournaient sur lui. Il avait un charme fou. Pas normal qu’il n’ait pas de femme.

Ayant fini de massacrer son petit déjeuner, la jeune femme enleva tout puis nettoya vite fait la table. Il fallait peut être qu’elle pense à s’habiller aussi. Elle se dirigea donc dans le couloir, puis hésita à aller voir Kurtis. Non, mieux valait s’habiller convenablement avant. Elle alla donc dans sa chambre, puis enfila quelque chose pour rester à la maison : genre shorty et t-shirt. Elle se brossa les dents puis attacha ses cheveux en une jolie queue de cheval. Se maquiller? Non la flemme. C’est bon, elle était rayonnante. Elle sortit de sa chambre en se demandant ce qu’elle allait faire aujourd’hui, vu que c’était samedi. Elle ne put pousser à plus loin ses pensées car elle croisa Kurtis dans le couloir. Flûte. C’était peut être le moment de s’expliquer?

- Je ne sais pas toi, mais moi ça me tracasse un peu à vrai dire. Je ne saurais même pas t’expliquer mon geste… Je… Je ne sais pas. Et ça à le don de m’énerver.

Elle marqua une pause, puis fixa à nouveau Kurtis. Et lui alors? Qu’est-ce qu’il en pensait de tout ça?

- Et toi alors, qu’est-ce que tu veux?

Bah quoi, elle lui retournait la question, normal. Elle voulait savoir elle aussi! Pas qu’elle soit la seule idiote à affronter la chose. Elle s’attendait surtout à un : non mais tu es mon employée, je ne peux pas blabla. C’était peut être un peu ce qui la bloquait à elle aussi à vrai dire. Et puis là en le regardant, ce n’est pas qu’elle se contrôlait, mais elle avait sentit lorsqu’elle l’avait embrassé, qu’il avait en quelques sortes aimé ce contact.

- Parce que je ne sais pas si je devrais m’en aller… J’ai trouvé quelques bons appartements.

En effet, si ils s’attiraient et qu’ils cohabitaient, la colocation allait se réveler compliquée. Ils craqueraient un jour ou l’autre, non? Autant qu'elle parte alors, si il ne voulait rien d'elle.