La rencontre... [Terminé]

Naëlle avait un exposé à faire sur la Guerre de Sécession avec sa copine, Suzan. Elle avait expliqué à son ainée qu’elle devait aller chez son amie parce que cette dernière avait à garder son petit frère. Bien sûr, elle avait tu l’histoire du restaurant avec Connor et son père. Bref quoi qu’il en soit elle avait fini par se rendre chez son binôme pour travailler à son exposé. Naé n’avait pas pris de vêtements particuliers, juste un rechange pour le lendemain matin vu qu’elle passerait la nuit chez Suzan, après son diner. Elle avait eu peur que ce soit louche si elle emportait avec elle des habits trop habillés. Elle aurait eu l’impression de lancer le message « Hé, vous avez vu ? Ce soir je vais faire la fête… ». Au contraire, elle n’en menait pas large. Elle avait la trouille de faire une boulette et de mettre son faux petit ami dans la merde. Elle culpabilisait de devoir agir en douce.

Après avoir dit à Suzan qu’elle pensait être de retour pas trop tard et qu’elle lui enverrait un texto pour qu’elle lui ouvre, Naé descendit attendre Connor au coin de la rue. Quand il lui fit comprendre qu’elle devait monter à l’arrière, elle le regarda comme s’il avait perdu la tête. Elle n’avait aucunement l’intention de jouer à Miss Daisy et son chauffeur. Cependant, n’ayant pas envie de se prendre la tête avec lui, elle obtempéra. Elle était sur le point de répliquer quelque chose, quand il lui dit qu’il n’allait pas à McDo et qu’il lui fallait quelque chose de plus habillés.

- La vacheeeeeeeee ! lâcha-t-elle en découvrant la robe de cocktail. Connor, tu sais ce qu’on a oublié de mettre au point ? C’est comment me comporter dans un restaurant où il faut porter une telle tenue.

Bah oui quoi ? A McDo on mangeait ses frites avec ses doigts, tandis que dans ses genres de restaurant il y avait trente-six mille couverts. Enfin les fourchettes, les cuillères et les couteaux. Comment savoir lesquels utiliser au bon moment ? Un restaurant beaucoup moins huppé lui aurait tout à fait convenu.

Toutefois, Naé ne se le fit pas redire une seconde fois. En mettant ses vêtements de hautes coutures, elle allait pouvoir jouer ce rôle de composition. Après tout, ça ne lui ressemblait pas de porter des choses aussi chères. Et pas une seconde, elle vérifia le rétroviseur pour s’assurer que l’Anglais ne l’observait pas. En même temps, elle aurait bien eu du mal à le faire puisqu’elle devait se déshabiller pour se rhabiller. Elle était en train de mettre sa seconde chaussure quand la voiture s’arrêta. Avant de sortir, elle se saisit de son manteau dans l’intention de le mettre, pour ne pas attraper la mort.

- Euh… Oui ! Dit-elle avant de faire comme demandé.

Elle se demandait ce qu’il avait encore en tête. Et la demoiselle eut en tête les images de High School Musical 2, quand Troy Bolton passe un collier avec un pendentif avec un « T » à Gabrielle. Naëlle regarda ledit pendentif quand elle sentit quelque chose de froid au niveau de sa gorge. Et pour un peu, elle fallait lâcher un soupir en constatant que ce n’était pas « C » qu’elle portait autour du cou.

- Merci, est-ce que je ressemble à la nouvelle Cendrillon ? Je présume que tu as entendu parler de ça au lycée.

Même un esquimau d’Alaska en aurait entendu parler. Ses camarades de classe n’étaient pas discrets pour deux ronds. Ils publiaient n’importe quoi sur leurs réseaux sociaux se moquant des répercussions, ne vérifiant pas la véracité des rumeurs qu’ils entendaient dans les couloirs du bahut.

La jeune femme mit quelques minutes avant de se saisir de la main de Connor. Elle savait qu’il attendait qu’elle soit prête pour le faire, que ça serait le signal. Il l’entraina dans le luxueux restaurant. Autant dire que la décoration en mettait plein la vue. Surtout à des personnes de sa condition.

- Bonsoir, Monsieur Montgomery, répondit-elle à son tour, assez mal à l’aise.

Elle ne savait pas comment réagir face à cet homme, qui l’avait retrouvé en mauvaise posture avec Connor. Néanmoins, elle retrouva en lui la façon de faire du jeune homme. Il lui tenait les mains comme il l’avait fait dans sa voiture, une semaine auparavant. Certes, cette fois-ci l’homme n’essayait pas de les lui réchauffer en soufflant dessus. Quand il l’eut relâché, elle s’installa sur le siège que le lycéen avait tiré pour elle.

Une fois Connor assis près d’elle, elle posa sa main sur sa cuisse. Juste une façon de se rassurer. Puis ça restait discret comme geste. Le père du jeune homme demanda s’ils désiraient boire quelque chose en apéritif.

- Un verre de Coca si c’est possible, autrement un verre d’eau.

Certes, ce geste ne lui ressemblait pas mais elle avait besoin d’un soutien et c’était la seule chose qu’elle avait trouvé. En même temps, ça pouvait passer pour un simple geste d’amoureux, aux yeux du père de Connor. Donc la situation restait sauve pour l’instant, il faudrait juste faire attention aux réponses qu’elle pourrait donner au père de son faux petit ami.

Une fois que le jeune couple eut répondu à la question, Mr Montgomery commanda les boissons. Et le temps qu'elles arrivent, il commença à interroger Naëlle sur sa famille, se servant du prétexte que son fils s’était montré discret sur la question. Heureusement qu’il eut le réflexe de prendre la parole avant elle. Peut-être était-ce dû au fait, elle avait légèrement crispé sa main sur sa cuisse.  

- Je suis en première, répondit-elle au sujet de sa classe.

Naé commença à se détendre quand elle sentit la main du jeune homme se poser sur la sienne. C’était un simple geste de réconfort, mais elle se savait à ces cotés et elle en était rassurée.

- Ma sœur Noëlia est pâtissière, elle a repris la gérance de la pâtisserie familiale, quant à mon frère Natéo, il est fleuriste.

Elle se saisit de son verre avec sa main libre, pour boire une gorgée de sa boisson. Elle était en train de prendre son temps, elle avait conscience qu’elle ne pourrait pas éternellement échapper à la question sur ses parents. Autant être honnête avec le père de Connor, même s’il s’agissait d’un mensonge, au moins elle saurait comment réagir quand ça deviendrait réalité.

- Non, ce n’est pas grave comment auriez-vous pu le savoir si Connor ne vous a rien dit ? Commença-t-elle. En fait, mon père est mort lorsque j’avais 9 ans, et ma mère est actuellement hospitalisée. C’est pour cette raison, que ma sœur s’occupe de moi.

C’était la vérité. Elle avait juste tu le fait que son père s’était fait tué en pleine rue, et que sa mère était dans un asile. Les gens n’avaient pas besoin d’un savoir plus. De toute façon, les mauvaises langues s’en chargeraient en temps voulu pour elle et sa famille.

- Ensuite, il n’y a pas grand-chose à dire sur ma petite personne. Comme beaucoup d’adolescente, je fais du baby-sitting. Autrement j’aide ma sœur à la pâtisserie.

Elle évita de parler du fait qu’on oubliait de l’inviter aux soirées de leur camarade d’école, parce qu’elle n’était pas de bonnes conditions. De toute façon, elle n’avait pas pour ambition de faire figurer sur ses CV qu’elle était la reine des beuveries ni qu’elle finissait raide tous les weekends.

- Monsieur Montgomery, est-ce que vous pouvez me dire quel genre de petit garçon était Connor ? Il ne veut rien me dire.

Naëlle se contenta de sourire quand le père de Connor lui dit que sa première boite, était un fleuriste. Honnêtement, elle avait un peu de mal à y croire mais depuis qu’elle connaissait son petit ami d’une soirée, elle allait de surprise en surprise. Alors pourquoi pas ? Après tout, il fallait bien commencer par quelque chose.

- Merci, dit-elle à Monsieur Montgomery quand il parla de ses parents.

Il fallait admettre qu’elle était mal à l’aise, même si elle avait compris que ce dernier ne relancerait pas le sujet. S’il avait besoin de plus d’informations à ce sujet, il pourrait questionner son fils pour obtenir des réponses. Enfin, si Connor daignait le faire.

Ensuite, Naëlle lui avait parlé d’elle comme demandé par l’homme en face d’elle. Donc, elle continua à jouer carte sur table et ce fut le plus naturellement qu’elle lui dit faire du baby-sitting et donner la main durant les weekends à la pâtisserie. Elle avait gardé pour elle, son job au supermarché. Bien sûr, elle venait de lui dire que sa famille n’était pas fortunée comme tous les gosses qui fréquentaient le lycée St James. La jeune femme avait compris qu’il taquinait son fils au sujet du travail, ce n’était pas méchant mais elle aurait dû prévoir la réaction du jeune homme. Elle avait compris qu’il était en conflit avec ses parents mais elle ne pensait pas que c’était aussi fort, pour ne pas dire qu’il ne faisait pas d’effort pour tenter d’un rapprochement avec son père. Dire qu’il gâchait cette seconde chance, alors qu’il y avait des personnes qui n’en auraient pas autant que lui.

Pour ne pas que la situation dégénère davantage, Naëlle posa une question au père de Connor. Elle lui demandait qu’il lui parle du petit garçon que Connor avait été. Et quand elle découvrit le regard noir qu’il lui lança, elle se mordit l’intérieure de la joue comprenant qu’elle aurait dû choisir une autre tactique. Pourtant, elle voulait vraiment connaitre ce détail pour apprendre à la connaitre autrement. Peut-être que ça l’aiderait à creuser la carapace dans laquelle il s’était forgé au fil des années.

La jeune femme n’eut pas le loisir de dire quoi que ce soit, parce que Connor ouvrit la bouche pour contrer son père. La situation commençait à devenir extrêmement gênante et Naé ne savait plus trop quoi faire pour l’apaiser. Elle était de plus en plus stressée à chaque minute. Si ça continuait, elle risquait de fondre en larme puisque c’était encore de sa faute.

Heureusement que le serveur vint faire diversion. Naëlle retira sa main – à regret, il faut bien l’avouer – de la cuisse de Connor, afin de pouvoir ouvrir le menu et faire son choix.

- Un feuilleté de St Jacques, annonça-t-elle avant de refermer le menu.

Naëlle n’était pas absolument à l’aise de ce genre de lieux huppés, elle préférait de loin les lieux plus familiaux, plus conviviaux. Les endroits où l’on pouvait être soi et être vêtue de ses vêtements de tous les jours. Elle choisirait le plat après, en fonction de son appétit.

- Messieurs veuillez m’excuser mais je dois aller me repoudrer le nez, déclara-t-elle en se levant.

C’était totalement ridicule comme phrase, mais l’ayant entendu dans les films elle l’avait glissé. Puis ça faisait mieux que « excusez-moi, mais je dois aller vidanger ! ». Naëlle se leva et partit à la recherche des toilettes pour dame. Autant dire, qu’elle mit un certain temps pour les trouver dans ce labyrinthe. Quand elle y entra, toutes les dames de la haute société la dévisagèrent comme si elle s’était trompée de lieux. Elle entra dans une cabine comme si de rien n’était. Les dames en profitèrent pour déblatérer sur son dos, certaines savaient qui elle était, et d’autres ne comprenaient pas ce qu’elle faisait avec les Montgomery.

Toutefois, ces femmes commencèrent à quitter les lieux les unes après les autres. Naëlle sortit de son abri quand elle fut plus ou moins certaine, d’être toute seule. Elle se dirigea vers les lavabos pour se laver les mains. Bah oui, il ne manquerait plus que ces femmes disent d’elle qu’elle était une souillon, enfin qu’elle ne se lavait pas les mains après avoir été aux toilettes.

Cela dit, elle profita de cette tranquillité pour se regarder dans le miroir. Autant dire, qu’elle eut du mal à se reconnaitre dans cette robe de haute facture, avec ce collier.

- Je vais devoir les rendre à Connor, dit-elle à haute voix, même si elle aurait bien aimé les conserver. Naëlle savait qu’elle ne le pouvait pas, on ne l’achetait pas avec des bijoux et des beaux vêtements.

Elle était en train de dire qu’elle allait devoir tout rendre à Connor, après cette soirée. C’était une évidence. Elle ne pouvait pas se permettre de les conserver parce que ça engendrerait beaucoup trop de question. Notamment, celle de savoir si elle était une poule de luxe ou non. D’ailleurs l’intéressé fit son entrée dans les toilettes pour femmes.

- Non, je ne peux pas Connor ! Répéta-t-elle. C’est hors de prix et pas dans mes moyens. Je te les rendrais après le diner, tu en feras ce que tu en veux.

De toute façon, elle ne pouvait pas dire autre chose. Elle se voyait mal balancer de but en blanc « tu me l’offriras à Noel ou pour mon anniversaire ! », c’était pour sa petite amie. Hors, elle ne l’était pas, elle jouait un rôle pour la soirée pour que son père cesse d’être sur son dos. Elle devait cela en tête et ne pas se laisser à croire que c’était vrai, ce qu’elle avait plus ou moins oublié avant de quitter la table.

- Pour être plus libre de tes mouvements Connor, pas pour mes beaux yeux ! Répliqua la jeune femme.

Oui, il avait monté cette mascarade pour aller à ses fêtes, retrouver ses conquêtes… Pas pour retrouver Naé comme il le faisait croire à son géniteur. Autant dire que ce n’était pas vraiment flatteur de servir de couverture, alors qu’il s’en battait le coquillard de sa personne. C’était elle, la pauvre conne qui avait accepté de jouer le rôle qu’il lui avait créé de toute pièce.

Et évidemment, une vieille bique entra dans les toilettes à ce moment-là. Naëlle se détourna de son reflet pour regarder la nouvelle arrivante, avant d’observer Connor.

- Ne t’en fais pas mon Trésor, il nous reste celui de l’ascenseur et celui du jacuzzi à réaliser, rétorqua Naé à sa grande surprise.

Sur le coup, elle crut qu’il l’allait l’embrasser juste pour emmerder la vieille bourgeoise mais non. Il se contenta de lui murmurer un petit quelque chose à l’oreille avant de se dégager afin de quitter la pièce. Naé se retourna vers la glace pour arranger sa coiffure.

- Ces hommes, toujours impatients de nous mettre dans leur lit ! Déclara la jeune femme à la vieille bique. Néanmoins, celui-ci est un bon pigeon. Vous avez vu la tenue qu’il m’a offerte ? Et ce splendide collier ? Et je compte continuer à dilapider sa fortune. Elle se lava une nouvelle fois les mains, étant donné, qu’elle venait de toucher ses cheveux. Je vous souhaite une bonne soirée, Madame ! Dit-elle avant de quitter la pièce.

Elle retrouva son siège et ne sut dont pas ce que les deux hommes à sa table avaient pu dire durant son absence. Naé laissa planer le silence quelques instants, ce qui leur permit à tous de commencer à déguster leur entrée. Ce silence lui permettait de chercher une nouvelle question à poser.

- Je suis sure, qu’il aimait jouer aux pirates quand il était petit garçon ? Rôle qui devait lui aller à ravir avec ses cheveux longs.

Il n’aurait pas dû lui interdire de continuer à questionner son père. Elle voulait en apprendre davantage sur le jeune homme et comment le faire autrement ? A chaque fois, qu’elle avait tenté de le faire, il l’avait envoyé chier. Donc elle devait profiter de l’occasion, pour l’apprendre d’une autre personne. Peut-être qu’elle aurait pu le faire en l’absence de Connor, mais comment expliquer une entrevue en tête à tête avec son père.

Et bien sûr, il arriva ce qu’il devait arriver. Il lui planta la fourchette dans la cuisse. Naëlle dut prendre sur elle, pour ne pas hurler ni même se mettre à pleurer parce qu’il n’y avait pas été en douceur.

- Euh… En fait, je me suis juste mordue la langue ! Répondit-elle à la question.

Même si elle avait eu envie de dire tout autre chose. Elle posa ses couverts, l’appétit coupé, elle aurait du mal à avaler quelque chose de plus durant le reste du repas. Tout en écoutant la réponse du père de son faux petit ami, elle se massa la cuisse pour tenter de faire passer la douleur. Elle aurait un beau bleu le lendemain. Autant dire, qu’elle y réfléchirait à deux fois la prochaine fois, et qu’elle lui dirait non d’office.

Naëlle commanda du poisson en plat mais pour le coup c’était elle qui ne participait plus à la discussion. Elle se languissait de pouvoir partir parce que le repas était en train de partir en sucette. Et encore par sa faute. Encore une fois. Décidément, elle n’en loupait pas une. Il fallait qu’elle mette les pieds dans le plat. Même quand elle voulait se rattraper.

Et Connor s’amusa un peu plus avec les nerfs de la jeune femme. Faire une blague de mauvais gouts à une personne, c’était une chose mais être vulgaire de la sorte c’en était une autre. Autant dire, qu’il réussissait mieux qu’elle à déconcerter les autres ou à se le mettre à dos.

- Connor, commença-t-elle, ne sachant plus ou se mettre. Naëlle se leva de son siège et jeta sa serviette dans son assiette pleine. Je commence sérieusement à en avoir assez de ton comportement. Un coup tu es attentionné, un autre tu te comportes en vrai connard. Je n’arrive même plus à savoir quand tu plaisantes ou pas. Alors pour la dernière fois, le jour où je coucherai avec quelqu’un c’est quand je serai amoureuse. Ce qui est loin d’être notre cas.

Autant dire, qu’elle était en train de se faire remarquer par toutes les personnes présentes. Cela dit, elle était parvenue à ne pas cracher le morceau sur le mensonge monté de toute pièce pour satisfaire Monsieur Montgomery.

- N’oublies pas que je ne suis pas une de ces salopes que tu as mis dans ton lit jusqu’à présent, poursuivit-elle. Et pour un peu, on pourrait jurer qu’elle n’était pas en train de jouer la comédie. Que tu ne pourras pas m’acheter avec des cadeaux hors de prix, ni même m’attendrir avec un de tes sourires ou avec une de tes belles promesses.

Les disputes pourraient devenir un sport national – pour ne pas dire Olympique – pour Connor et Naëlle. Ils ne pouvaient pas s’en empêcher dès qu’ils étaient ensemble. Même si dernièrement ils s’étaient tenus tranquilles. Enfin, c’était peut-être pour ne pas finir à nouveau dans le bureau du proviseur et avoir encore des punitions ou une idée sortie tout droit de sous le crane de cet homme. Ou alors, Naëlle s’était tenue tranquille pour éviter d’inquiéter sa copine Johanna qui tentait de l’attirer dans sa toile.

Et là, l’histoire des toilettes avait été la goutte d’eau de trop pour elle. Naé ne put pas faire autrement que d’exploser. Connor aussi d’ailleurs. Les deux jeunes gens se tenaient debout l’un en face de l’autre. Un peu comme s’ils étaient seuls dans le restaurant. Les insultes fusèrent des deux parties. Cependant le lycéen l’attira à lui pour la faire taire.

Naëlle ne s’inquiéta pas pour son poignet. Elle finit par se laisser contre Connor après avoir tenté de se dégager. Sa main libre alla trouver la tignasse de ce dernier et elle s’y agrippa en quelque sorte. Elle avait l’impression d’être emportée dans un tourbillon de désirs et de sentiments qui lui étaient totalement inconnus. C’en était effrayant. Elle ne comprenait plus rien et s’était le boxon dans sa tête. En fait, elle ne savait plus si c’était faux ou réel. Leurs lèvres finirent par se détacher avec difficulté. Ils prenaient consciences de la situation petit à petit.

Le jeune couple suivit le moment, à savoir se diriger vers la sortie en compagnie du père du jeune homme. La jeune femme avait perdu l’usage de la parole momentanément, ce qui explique pourquoi elle ne dit rien quand son camarade d’école s’adressa à elle. Ce qui explique aussi pourquoi, elle mit autant de temps à faire ce qu’il lui avait demandé.

- Moi de même, dit-elle à Monsieur Montgomery.

Elle était malgré tout ravie d’avoir fait cette rencontre. Le père et le fils avaient beaucoup plus en commun que le second ne pouvait se l’imaginer. En revanche, elle ne parvenait pas à faire fi des remarques de Connor, parce qu’il pouvait être blessant par moment.

Et les dernières paroles de ce dernier ne firent que la troubler. Si elle avait été dans son état normal, elle lui aurait ri au nez. Elle, amoureuse de Connor ? Il en avait de bonnes blagues cet homme. Naëlle ne s’aperçut pas immédiatement que la voiture bougeait dans les rues pour la raccompagner chez Suzan.

- Connor, qu’est-ce qui s’est passé au restaurant ? demanda-t-elle en s’adossant à son dossier tout en fermant les yeux.

Elle ne saurait dire si Connor lui avait donné une réponse ou pas. Ce n’était pas parce qu’elle s’était endormie ou pas, elle se repassait le film pour tenter de comprendre de son côté.

Au bout d’un moment, Connor gara le véhicule et arrêta le moteur. Naëlle ne savait toujours pas comment interpréter ce que l’homme lui avait dit avant qu’elle monte en voiture. Ca ne pouvait pas être possible.

- Bonne nuit, Connor ! Commença par dire la métisse. A lundi, au lycée.

Mais au lieu de quitter le véhicule comme elle en avait l’intention, Naëlle s’empara de ses lèvres. C’était sa façon à elle de lui souhaiter bonne nuit.