De toutes les matières... C'est la ouate...[Chris - Terminé]

Naëlle avait attendu la fin du mois de janvier avant de contacter Chris. Elle aurait aimé le faire bien avant mais elle n’avait pas eu le temps. Entre son anniversaire, la boutique à faire tourner vu que l’employée, Méli, était en congés maternité et tout le reste. La jeune femme avait évité les magasins en période de solde. D’une part, parce qu’il y avait trop de monde et d’autre part, il fallait reconnaitre qu’elle ne trouvait jamais rien en solde.

Enfin bref, elle lui avait donc passé un coup de téléphone à Chris pour savoir s’il pouvait se voir. Il ne s’agissait pas là, d’un rendez-vous amoureux, juste d’une sortie entre ami. Naé adorait passer du temps avec ses copains, mais il était vrai qu’elle avait aussi besoin de passer du temps avec un adulte. Les discussions étaient autres et plus élevées, et ayant passé le stade de l’adolescence les conseils étaient beaucoup plus avisés. Après, il était vrai que ça dépendait de l’adulte et des sujets abordés.

Les deux amis avaient convenus de se retrouver directement au Centre Commercial, le rendez-vous avait été fixé devant une boutique pour enfant. Quoi qu’il fallait admettre que Naé avait été de lui faire le coup « je serai la fille à l’écharpe rouge », enfin façon de parler puisque son écharpe était grise et bonne à mettre à la poubelle. Ils avaient choisi ce lieu parce qu’ils pourraient s’asseoir à une table d’un petit café, tout comme faire les magasins.

Pour cette rencontre, elle avait mis quelque chose de décontractée : un jean, des baskets et un pull, sans oublier le manteau et le reste pour avoir chaud. Quand elle était en weekend, elle mettait sous des pantalons à cause de l’uniforme de lycée. Eté comme hiver, elle portait des jupes et elle avait besoin de changer.

Pensant être en retard, Naelle pressa le pas pour rejoindre le point de rendez-vous. Sur son chemin, elle fut arrêtée par une personne agée :

- Excusez-moi, vous pouvez m’indiquer les toilettes, s’il vous plait ?

La jeune femme releva la tête pour trouver le panneau d’indication afin de pouvoir lui répondre. Ce n’était pas la première fois qu’elle venait ici, mais disons que ce n’était pas une destination qu’elle prenait quand elle y était.

- Il faut que vous continuiez encore tout droit et ça sera sur votre gauche !

La vieille la remercia pour sa gentillesse avant de partir vers Madame-Pipi, en trottinant aussi vite que ses jambes pouvaient le faire. De son côté, Naëlle espérait vraiment de pas lui avoir donnée de mauvaises directives.

Elle la regarda s’éloigner avant de reprendre son chemin, pressant un peu plus le pas pour ne pas être en retard. Elle se mit presque à courir en voyant un blond de dos, pensant qu’il s’agissait du mécano :

- Chris, j’espère que je ne suis pas trop en retard ? s’enquit-elle, mais vira au rouge pivoine quand l’homme se retourna. Ce n’était pas du tout Chris. Oooooh, excusez-moi, je me suis trompée de personne.

Elle détala en vitesse, faisant style « je rejoins des amis ! » au plus. Elle se planqua plus ou moins dans un coin, pour attendre de le blond inconnu s’en aille avant retourner au point de rencontre.

Depuis sa visite dans la boutique Sullivan, datant de début décembre à quelque chose près, Chris n’avait pas véritablement arrêté de bouger, en vérité. Peu après ces achats de marchandises dans la boutique, Chris s’était permis d’un séjour à Miami, là où vivaient ses beaux-parents. Comme Ryan et lui passaient une mauvaise passe dans leur relation, il fallait absolument mettre un terme à tout ça et faire une pause, du moins, ne plus vraiment se voir pendant un temps pour aérer un peu le tout. Comme Ryan voulait entamer une surprise à l’attention de Fred, soit refaire sa chambre, ils avaient profité de cette idée pendant la première semaine de vacances de Noël pour que Chris embarque Fred à Miami pour voir les beaux-parents afin qu’au retour, le petit découvre la surprise qu’avait effectué son père ainsi que sa tante Cassandre qui avait grandement aidé à la main d’œuvre. Ainsi par la suite, Chris n’avait pas tellement eu le temps de discuter avec Ryan puisque les fêtes de famille s’en étaient suivies. Ils firent tant bien que mal de faire bonne figure au milieu de tout ça parce qu’une chose était certaine pour le moment, ni l’un ni l’autre pensait à rompre. Et l’eau avait plus ou moins coulé sous le pont… Fort heureusement sans doute puisqu’un événement survint pour les réconcilier ! Ils n’avaient pas le temps de s’ennuyer puisque les parents de Chris avaient décidé de reprendre contact avec lui après l’avoir renié pour son homosexualité dix ans plus tôt. Ceci dit, « Parents » était un grand mot. En vérité, c’était plus sa mère qui était enclin à s’ouvrir à lui et c’était plutôt une bonne nouvelle. Quant à son père, c’était un échec total ! Cependant, Chris avait pu lui balancer ses quatre vérités en face et c’était d’un soulagement.

Après toute ces péripéties, Chris fut plutôt heureux d’avoir des nouvelles de Naëlle pour le coup. Il était plutôt flatté qu’elle ait une pensée pour lui ! Du moins, ça lui faisait tout amplement sourire sur le coup puisque ce bout était une bouffée d’air frais. Depuis le temps, elle avait sûrement été occupée de son côté mais au moins elle tombait à pique. Il accepta volontiers son invitation, du moins, de se revoir au centre commercial et cela en fonction de leur disponibilité. Peut-être, cherchait-elle un cadeau pour un éventuel amoureux puisque la Saint-Valentin approchait ! Et puis il fallait dire, de faire un peu de shopping, ce n’était pas ce qui le dérangeait le plus : il y avait toujours des trucs à faire. Pour les jeunes – et aussi pour la portée de tous – les libraires ou les disquaires, ou encore pour les fanatiques de mode, les magasins de vêtements ou pour comme Chris qui aimait bien prendre soin de lui, les instituts de beauté.

Originaire de New-York, Chris connaissait tout de même le moindre recoin et de ce centre commercial, il n’y allait pas forcément toutes les semaines mais il avait déjà pu observer les évolutions et les changements, et de ce fait, il avait bien pu remarquer ce magasin pour enfant au milieu de tous ces commerces. Notamment, il l’avait surtout un peu mieux remarqué depuis qu’il avait son beau-fils sous son aile, c’est-à-dire depuis trois ans déjà.

Habillé d’un jean, d’une veste assez chaude ainsi que d’une simple écharpe, il se faufilait au milieu de ces allées pour ainsi retrouver sa jeune amie. Il ne savait s’il était réellement en retard ou non et si la jeune Naëlle serait déjà là ! Se dirigeant au point de rendez-vous, Chris ne la vit pas. Du moins, pour le moment, elle ne lui semblait pas être déjà là. Chris jeta un oeil à son portable au cas où si elle ne lui aurait pas envoyé un texto pour annoncer le moindre retard.

Il fallait reconnaitre que la rencontre proposée par Naëlle n’était pas entièrement désintéressée. La première raison était bien évidemment qu’elle voulait revoir le mécano. Et la seconde, était qu’il pourrait peut-être l’aider à trouver quelque chose qui ne fasse pas cucul la praline : pour Connor et pour sa première vraie St Valentin. En fait, elle aimerait offrir quelque chose de simple et de pas trop cher à son Anglais. Elle n’osait pas demander à ses copines parce qu’elles prendraient un malin plaisir à la questionner, même si tout le monde savait qu’elle sortait avec Connor depuis deux mois. Elle évitait de leur en parler également, parce qu’elles n’avaient pas le même portemonnaie à disposition et que ses deux meilleures amies n’hésitaient pas à offrir des cadeaux que Naëlle ne pourrait pas se payer. Même en piochant dans sa petite cagnotte. Mais pas seulement, il pourrait également lui donner quelques conseils concernant les hommes. Bon, elle verrait comment aborder le sujet quand le moment serait venu.

Pour l’heure, elle devait se remettre de ses émotions. Heureusement que ce coup-ci, elle s’était trompée sur la personne de Chris. La dernière fois que ça lui était arrivé, elle avait embrassé un autre homme que Connor, devant celui-ci pour ne pas faire dans la demi-mesure.

Quand le type qu’elle avait pris pour le mécano, était enfin parti, Naé avait pu repartir sur le lieu de rencontre. A la voir regarder de gauche à droite, puis de droite à gauche, on pourrait croire qu’elle était en train de regarder un match de tennis dans les gradins de Roland Garros. Et non pas en train de surveiller l’arrivée du surfeur.

La lycéenne finit par l’apercevoir, il lui tournait le dos à regarder elle ne savait pas trop quoi. Pleins d’idées lui passa par la tête, du style tenter de lui mettre les mains devant les yeux pour lui demander « Devines qui s’est ? », comme lui pincer les fesse et encore plein d’autres choses. Mais, elle serait sage. Enfin dans la mesure du possible.

Elle se contenta de passer son bras dans celui de Chris, et de dire :

- Je t’ai trouvé, c’est toi le chat !

Elle tourna son visage vers lui pour lui offrir son plus joli sourire. Elle pouvait se le permettre, elle savait qu’elle ne risquait rien avec lui. C’était un peu comme si une personne de bien attentionnée – peut être son père allait savoir – avait décidé de le mettre sur sa route. Un peu comme s’il était un ange gardien. Pour la jeune femme, elle avait plutôt l’impression d’avoir trouvé un oncle. D’autant plus, qu’elle ignorait ce que ça faisait d’avoir autour de soi un oncle ou une tante. Ou encore d’avoir un cousin, après tout il n’était pas trop pour jouer ce rôle également.

- Comme nous sommes encore en janvier, je vais commencer par te souhaiter une bonne année et tout le tralala qui va avec, hein !

Elle se mit sur la pointe des pointes des pieds pour déposer un bisou sur l’une de ses joues.

- Heureusement, qu’il n’y a plus de branche de guis et qu’ils n’en mettent pas dans les centres commerciaux, annonça-t-elle en prenant le plus sérieusement du monde. Mais elle éclata de rire bien vite. Hmmm… On commence par quoi ?

Jetant un œil à l’écran de son téléphone : non, il n’y avait effectivement pas de messages à son encontre. Pas de nouvelles, bonnes nouvelles ? Oh, pas que Chris pouvait s’inquiéter de quoi que ce soit, hein, ou bien qu’il n’avait pas confiance en Naëlle, ce qui était au fond tout simplement stupide, mais savait-on jamais, Chris était plutôt prévoyant ! Cependant, il n’avait pas forcément à attendre très longtemps puisqu’il sentit une présence au niveau de son bras comme s’ils étaient deux bons amis et à la désignation du « chat » ne pouvait que le faire sourire. C’était un bon vieux jeu mais à la fois mignon et amusant.

Oh crap ! Je me suis fait avoir !

Ceci dit, s’ils jouaient réellement au jeu et à se mettre à courir au milieu de ce centre commercial, tout dépendait si Naëlle était sportive mais Chris ne lui donnerait pas cher de sa peau pour la rattraper ! Qu’importait !

Salut ! reprit-il alors, la saluant à son tour, surtout après le fait qu’elle lui souhaite la bonne année, toutes ces belles paroles que l’on se disait chaque année : Bonne année et tout ce qui s’en suit toi aussi.

Et après les salutations et les bonnes paroles, Naëlle fit alors référence à la branche de guis et cela faisait plutôt bien marrer d’un côté le jeune homme.

Serait-ce une révélation ?

Tout de même ! Même s’ils avaient plutôt entamé une relation un peu taquine, faudrait-il prendre cela au sérieux ? Ce n’était qu’une simple adolescente alors, pas du tout. Au contraire, il mettrait bien les points sur les I, tout en sachant qu’il était en couple avec un gamin dans les parages. Sur ce, par où commencer ? Ce n’était pas l’endroit où ils pouvaient manquer de choix. Tout en jetant un œil en travers du centre commercial, il remarquait le magasin de parfumerie et tout autres produits cosmétiques. Alors, il fit signe à Naëlle.

Ca te dit là-bas, la parfumerie ?

Pas que Chris devait se reprendre une recharge d’un de ses parfums favoris mais qui savait s’il n’y avait pas un des produits qui pourraient l’intéresser ou si ça ne pouvait pas lui donner une idée de cadeaux à Ryan pour la Saint-Valentin. Et cela dit, ça pouvait bien surprendre les nanas qu’un mec puisse s’intéresser à ce genre de choses, mais ça pouvait tout aussi surprendre les mecs également en général parce qu’une chose était certaine, ce n’était pas avec tout le monde qu’il pouvait flâner tranquillement dans ce genre de rayons.

Je dois chercher mon parfum ! fit-il pour dire qu'il proposait ce lieu sérieusement.

L’idée de jouer à « Chat » pouvait être tentant, surtout dans un Centre Commercial. Cela dit, ça ferait vite désordre, un samedi après-midi parce qu’il y avait énormément de monde. Ca ne serait pas du gout des badauds de se faire bousculer par deux personnes en train de courir pour ne pas se faire toucher. Mais elle ne le ferait pas, elle n’avait pas envie d’avoir des ennuis et d’en faire à Chris par la même occasion.

Elle ne put s’empêcher de rire quand il lui demanda si elle venait de lui faire une révélation. Non, ce n’était aucunement le cas, Naé avait beau être une chieuse mais elle connaissait les limites à ne pas dépasser. Or, imaginons qu’un adulte passe à ce moment là – à savoir à une ébauche de baiser sous le gui – il aurait de quoi se faire des films et n’irait pas chercher midi à quatorze heures.

- Non, non ! Répondit-elle à la question du mécano.

Après tout, il fallait reconnaitre que pour cette fois ses paroles pouvaient laisser penser tout autre chose. Même s’il n’y avait aucune arrière-pensée. Même s’il avait compris qu’elle était en train de plaisanter. Les directeurs de ces centres commerciaux n’étaient pas fous pour mettre des branches de guis ici et là, vous imaginez tous les procès qu’ils auraient sur le dos ? Leur but était de se faire du fric pas d’en perdre pour acheter le silence des clients mécontents ou en avocat.

Ensuite, elle demanda par quelle boutique commençait parce qu’il y en avait un nombre incalculable et pour tous les gouts. Autant aller dans ceux dont ils avaient besoin de quelque chose pour finir par ceux qui attireraient leur curiosité. Et comme à chaque fois qu’on venait dans ces lieux, on repartait avec des achats inutiles.

- La parfumerie ?

Pas parce qu’elle ne le croyait pas, seulement parce que pour le coup elle ne la voyait pas. Elle n’était pas bigleuse, seulement qu’elle avait du mal à voir le nom des boutiques à cause de la populace. Elle se promit que la prochaine fois, elle choisirait un jour de semaine pour avoir un peu plus de tranquillité et encore, ça devait correspondre aux allées et venues du troisième et quatrième âge.

- Allons-y, finit-elle par lui dire quand il précisa qu’il avait besoin d’y aller. Ca me permettra de voir les dernières nouveautés, avait-elle ajouté.

Elle avait failli parler des offres sur les coffrets spéciales St Valentin, mais elle verrait bien le moment venu et si elle avait un coup de cœur.

- J’en profiterai pour voir si je trouve un mascara et un gloss, les miens ne vont pas tarder à me lâcher !

Elle avait un peu l’impression de parler à l’une de ses copines, et c’était un peu bizarre de discuter maquillage avec un homme. Peut-être qu’elle devrait essayer avec Connor, pour connaitre sa réaction. C’était comme si elle se mettait en tête de lui passer de la crème sur le visage. Aucune chance pour que ça se produise un jour.

*Il ne dirait pas non à de l’huile de massage !*, ça elle serait « presque » prête à mettre sa main au feu.

- Tu me feras découvrir ton parfum ?

Evidement, Chris parlait effectivement bien de la parfumerie dont Naëlle semblait chercher du coin de l’œil. Avec tout ce monde, un peu difficile de voir un peu tout ce qui se passe autour mais au moins, directement dans le magasin, ça sera sans doute un peu mieux. Au moins, ce n’était pas une adolescente qui allait refuser de se rendre dans ce genre de boutique. Chris avait une sœur, même si ces derniers temps, il ne partageait pas vraiment ces moments avec elle.

Sur ce, c’était parti pour de petites emplettes à flâner dans les rayons. D’autant plus que Naëlle souhaitait découvrir son parfum, parfums qui étaient situés au fond du magasin. Après, ils pourront se détourner sur ce que Naëlle pouvait avoir besoin, soit du mascara et gloss.

Viens ! l’entraîna-t-il jusqu’au fond du magasin.

Se retrouvant donc devant le rayon des flacons, Chris cherchait de l’œil son flacon habituel et finit par le trouver : un Diesel. Il prit un échantillon ainsi pour faire sentir à la jeune fille.

Alors ? demanda-t-il alors pour savoir son avis.

Après à savoir de ce qu’elle pouvait réellement penser, il était bien curieux. Il leva un sourcil, dévisageant sa réaction. En tout cas, pour sa part, ce parfum était son préféré. Il jetait un œil par la suite aux autres parfums comme s’il pouvait avoir effectivement une illumination pour un petit truc pour son valentin préféré, parce que dans le fond, Ryan n’était pas trop parfum. Bien que d’acheter son propre parfum à lui, pouvait plaire à son homme mais après, Chris ne sera sans doute pas vraiment en manque d’idées.

Dis-moi, commença-t-il comme ça, doucement : tu as un copain ?

N’était-ce pas qu’un peu par curiosité, mais au moins, c’était un pour engager la conversation ! Surtout que la Saint-Valentin était bientôt, ce qui faisait entamer le sujet. Les fois où ils avaient pu discuter, Naëlle n'en avait pas fait mention. Chris se rappelait déjà à l’époque que lorsqu’on lui posait la question, ça pouvait un peu l’emmerder, enfin surtout au moment où son ex avait été décédé dans un accident tragique et que Chris avait mis un moment pour son remettre quelques années plus tôt… Non mais il y avait surtout le fait qu’il s’intéressait beaucoup à cette adolescente. Il y avait cette envie de la connaître mais surtout de la protéger comme une sœur.

La jeune métisse suivit donc son compagnon de shopping jusqu’à la parfumerie. Ils avaient dus serpenter entre les badauds du samedi, et bien sûr, ils s’étaient pris quelques coups au passage. Par exemple, Naëlle avait reçu un coup de coude au niveau de la poitrine autant dire que ça ne faisait pas du bien. Elle avait porté ses mains aussi discrètement que possible à cet endroit juste le temps que la douleur passe. Une fois dans la boutique c’était comme si de rien n’était.

A peine un pied dans la parfumerie, toutes ses odeurs de fragrances prirent d’assaut les narines de la jeune femme. Elle était bien incapable de reconnaitre un seul parfum, tellement ils étaient entremêlés les uns aux autres. Heureusement qu’elle n’était pas du genre à faire des migraines avec tous ses mélanges.

Naé sortit les mains de ses poches pour prendre l’échantillon que lui tendait le mécano. Elle le porta à son nez pour s’imprégner de la fragrance.

- C’est frais, articula-t-elle tout en relevant les yeux sur le blondinet. Ça te ressemble bien, finit-elle par dire.

Oui, ce parfum lui correspondait parfaitement. S’il avait choisi quelque chose de plus capiteux, de trop fort, la métisse aurait eu de mal à retrouver le jeune homme. Même s’il prenait soin de lui, c’était un homme simple. Puis son parfum ne devait pas tourner avec les odeurs au garage, entre le café rance et le cambouis.

- J’ai l’impression de retrouver la sensation de grand air, ça fait ressortir ton coté surfeur, du moins c’était ainsi qu’elle le voyait et elle pouvait se tromper.

Elle se mit à sourire parce qu’elle repensait à l’épisode du zoo au sujet de l’aigle. Il n’y avait pas à dire, Naé appréciait énormément Chris. C’était un peu comme si elle avait un second grand frère, mais celui-ci était plus présent que le véritable et pourtant, il ne se voyait qu’une fois de temps en temps. Il n’y avait pas à dire Chris s’intéressait beaucoup plus à elle, à ses résultats scolaires, à poser une multitude de questions pour la connaitre mais aussi pour se faire une idée de son humeur et de ses émotions du moment. Naé ne savait plus quand son frère avait pris le temps de discuter avec elle, c’était un fantôme. En gros, il passait chez eux pour se changer avant de partir trainer jusqu’aux premières heures du matin, et quand il partait bosser elle était déjà au lycée.

Quand elle entendit la question de Chris, elle sentit ses joues s’enflammer. D’une part, elle ne s’y attendait pas et d’autre part, elle ne savait pas exactement ce qu’elle pouvait répondre. Il était évident que leur relation avait beaucoup évolué depuis qu’ils se fréquentaient mais elle n’avait jamais entendu Connor la qualifier de « petite copine », du moins en sa présence. Pour le coup, elle avait l’impression d’être Nick dans la série « new girl », qui ne veut pas d’étiquette avec sa chérie de moment. Puis, elle répondit à la question le plus simplement possible :

- Oui, il s’appelle Connor ! Que pouvait-elle dire de plus. On est dans le même lycée ! ajouta—t-elle.

Elle passa sous silence que c’était le type qui lui avait causé des problèmes à son arrivé. Ni qu’il s’agissait aussi de celui qui lui avait valu une punition supplémentaire à la maison et que c’était pour ça qu’il l’avait trouvé à la caisse le jour qu’il était passé à la boutique.

- Et si ça peut te rassurer on a encore rien fait !

Elle ne savait pas pourquoi elle avait précisé ce point. Peut-être par peur de la discussion que ce genre de détail pouvait engendrer : la préservatif, la contraception, le fait de ne pas être marié et j’en passe.

Se faufilant au milieu de cette parfumerie, essayant de se faire un passage, Chris ne remarqua pas le coup que Naëlle avait pu recevoir. S’il avait su et vu… Cela dit, ils purent se glisser dans un endroit plus « calme » dans le rayon voulu. Le blondinet en profita pour lui faire sentir son parfum qui d’ailleurs Naëlle semblait apprécier. Le fait même qu’elle ajoute que cela lui ressemblait, ça ne lui faisait que sourire. Ce qui l’étonnait un peu plus, c’était qu’elle commentait par rapport à son côté surfeur.

Tu me vois ainsi ? taquina-t-il dans un sourire.

Bon, ce n’était pas forcément bien compliqué si on se rappelait que Fred avait vendu « la mèche » lorsqu’ils jouaient à deviner quel était son animal favori, en faisant référence aux émissions de surf, sous-entendant que Chris aimait cette activité mais pas forcément qu’il en pratiquait.

Pour dire, Naëlle était des plus amusantes. Chris la trouvait intéressante : elle était douce, intelligente, mature pour son âge et elle avait ce côté qui donnait à Chris l’envie de la protéger. C’était bête, mais c’était ainsi ! Elle lui rappelait un peu sa sœur Cassandre même si cette dernière était différente avec un caractère assez trempé, ce qui n’empêchait pas non plus à Chris de vouloir la protéger elle aussi.

Cela dit, c’était d’une des raisons de sa question puisqu’il s’intéressait à elle. De savoir un peu comment ça allait, elle vivait… Elle n’avait pas fait mention jusque là si elle avait un copain. C’était loin d’une curiosité mal placée. Comme le courant s’étant bien passé au zoo et un peu plus lorsque Chris la retrouva par hasard à la pâtisserie, un lien amical se construisait. Effectivement, Naëlle avait un copain. Tant mieux pour elle, Chris en était plutôt content. Enfin, même s’il ne connaissait pas ce garçon. Oui, vous pouvez râler, Chris n’avait pas tout à fait la même réaction envers les garçons quand ça concernait Cassandre… Il leva un sourcil interrogateur avant d’être amusé par la situation quand Naëlle ajouta que son copain et elle n’avait encore rien fait.

Je n’ai rien dit ! répondit-il en souriant.

Oh, ce n’était pas lui qui allait lui interdire de ne pas faire quelque chose ou faire ses propres expériences, n’est-ce pas ? (Cela dit, il serait capable de mettre Cassandre au couvent !) Après tout, Naëlle avait 16 ou 17 ans, si ce n’était pas l’âge où on découvrait les amours, tout ça… Lui-même, à cet âge, découvrait ce que c’était et c’était même à cet âge qu’il avait découvert son homosexualité après une longue relation avec une fille.

Ca fait longtemps ?

Juste une question comme ça pour enchaîner la conversation et s’intéresser à ce que Naëlle pourrait lui confier ou dire sur ce Connor éventuel.

Je suis un peu curieux. Si ça te dérange d'en parler, il n'y a pas de souci! s'excusa-t-il.

Sur ce, Chris récupéra un flacon de son parfum préféré puis il réfléchissait s’il en prendrait finalement un pour Ryan ou plutôt, s’il ne prendrait pas autre chose finalement, quelque chose de moins banal.

T’as un parfum que tu préfères ?

Passant presque du coq à l'âne, et pas qu'il était un pro des parfums et des parfums féminins ... mais puisqu'ils étaient dans une parfumerie... Chris pouvait bien sûr se douter que la jeune adolescente n'avait pas forcément un budget pour un sacré bon parfum comme il pouvait l'imaginer. Il y avait de tout et pour tous les prix.

Naé se contenta de lui répondre en hochant la tête, de bas en haut pour répondre à sa question. Oui c’était ainsi qu’elle le voyait mais elle ne pourrait pas vraiment dire le comment du pourquoi, et ce malgré les informations qu’elle avait en sa possession. Enfin, information était peut être bien un grand mot, disons plutôt, des bribes obtenu par le jeune Fred.

L’adolescente était en train de découvrir les nouveautés, tout en écoutant les questions de son compagnon de shopping. Même si elle s’était mise à rougir quand il la questionna sur ses amours, elle ne tourna pas autour du pot et y répondit. Évidemment, Naé n’aurait pas était Naé si elle n’avait pas émis son petit commentaire personnel alors qu’on ne lui avait rien demandé.

- Je sais, j’ai juste anticipé la question ! Répondit-elle malgré tout.

Certes elle n’avait pas à se justifier sur le sujet, d’autant plus qu’il ne lui demandait pas. Elle avait légèrement arrangé la vérité, mais le mécano n’était pas dupe il savait ce qu’il se passait dans une chambre quand deux ados s’y retrouvaient seuls. Naëlle n’avait pas encore sauté le pas mais elle avait fait quelques expériences, comme dormir dans les bras de Connor.

- En fait, je ne sais pas trop comment répondre à ta question, avoua la jeune femme. J’aurais tendance à dire que notre histoire a commencé fin novembre mais je n’en suis pas sure.

Elle préféra encore une fois une version plus ou moins proche de la vérité. La jeune femme ne savait pas quand c’était devenu officiel entre eux. Même le père de Connor avait vu claire en elle, lors de leur première rencontre et dire qu’elle ne l’avait pas cru à ce moment-là. Toutefois, elle ne s’aventurerait pas à poser cette question à Connor parce qu’il serait capable de lui dire qu’ils ne formaient pas un couple. La jeune métisse n’en dit pas davantage sur la question, parce qu’elle ne savait pas quoi dire de plus. Elle n’ignorait jusqu’où elle pouvait aller, même si elle avait confiance en Chris. Réaction on ne peut plus normal quand on pense à ce qui lui était arrivé la derrière fois qu’elle s’était confiée à une personne.

Le blondinet posa une question dans un tout autre registre. Il voulait connaitre le parfum de Naëlle.

- C’est « Fleur Défendue » ! dit-elle en reposant le flacon d’exposition qu’elle avait en main.

Les deux amis se rendirent aux rayonnages consacrés au parfum pour femme. Naé trouva l’endroit où se trouvaient les créations de Lolita Lempicka. Elle avait beau chercher mais elle ne trouvait pas son parfum. Enfin, en même temps, son flacon ça faisait déjà un moment qu’elle l’avait eu en cadeau. Peut-être qu’il n’était plus commercialisé ou alors elle s’était plantée de nom.

- Dis Chris, comment je dois m’y prendre pour lui dire ce que je ressens sans qu’il prenne ses jambes à son cou ? Demanda-t-elle en abandonnant ses recherches, ils pourraient les reprendre après.

Naëlle l’amusait quand même. Elle anticipait une question qu’il n’avait pas forcément pensé à poser. Quoique, il l’aurait sans doute pensé si l’adolescente avait déjà passé le cap mais Chris ne se serait pas vu de lui poser la question. Mais ils n’allaient pas se disputer pour ça. Chris allait prendre seulement ce que Naëlle voulait bien lui dire et il ne la forcerait pas à se dévoiler autant si ça la dérangeait. La mettre mal-à-l’aise n’était absolument pas son but. Surtout qu’à sa question si c’était tout récent ou non, la réponse semblait un peu plus compliquée, comme si leur couple n’était pas tout à fait officiel, en réalité !

Ok, je vois…

Sur ce, Chris n’insista pas plus. C’était drôle, si ça avait été Cassandre, Chris n’aurait pas hésité à lui passer un interrogatoire. Bon, c’était Cassandre, sa sœur, il savait comment elle pouvait réagir et puis il fut un temps que malgré l’interrogatoire, Chris savait que sa sœur finirait par tout lui dire… Bien qu’en ce moment, il fallait avouer qu’il n’était pas bien proche d’elle et ne savait pas ce qu’il se passait dans sa vie. Il n’y avait que Cassandre ou les gens un peu plus proche qui avaient le droit de se coltiner un Chris un peu chieur.

Cela dit, c’était une des raisons qu’il changea de sujet pour revenir au parfum. Parce que bon, pas qu’ils étaient dans une parfumerie mais presque ! Il sut alors que c’était « Fleur Defendue », Chris ne savait pas que ça existait… Enfin, du moins, pas à sa connaissance ! En se dirigeant vers les rayons des parfums féminins, Naelle revint alors sur la conversation « petit ami » d’elle-même, du moins sur la manière de comment dire ses sentiments… Chris se stoppa un peu net, la regardant, et surtout en y réfléchissant pour le coup, parce que bon, lui-même n’avait pas forcément été un meilleur exemple : il n’avait qu’à repenser à comment ça s’était passé avec Ryan la première fois, il avait agi impulsivement en l’embrasser et lui dire après qu’il l’intéressait… et ça avait été un peu plus compliqué puisque Ryan était du genre hétéro… Et cette idée-là l’avait fait refouler ses sentiments qui n’étaient pas partis jusqu’à ce qu’il découvre que ses sentiments étaient réciproques au bout de plusieurs mois, bien un an après qu’ils se soient connus.

Sur ce, Chris lui dirait bien de lui dire tout simplement mais cela n’était pas forcément des plus simples pour la plupart et jamais simples pour tout le monde.

Euh et bien… As-tu déjà essayé de le lui dire ? Comment est-il ?

Ce n’était que de simples questions pour essayer de bien se situer dans le contexte parce que c’était sûr que Chris ne connaissait pas le bougre.

Ca me semble un peu compliqué entre vous les deux, non ?

Pour qu’elle ne soit pas sûre que ça date de fin novembre… Enfin, bref, après ces quelques échanges, il pourrait sans doute mieux la conseiller du mieux qu'il pouvait.

La réponse de Naé était aussi contradictoire. D’un côté, elle disait qu’elle avait un petit ami. D’un autre côté, elle disait qu’elle n’était pas certaine de la date, donc il en était de même pour sa relation amoureuse. Enfin, au début c’était juste comme ça mais ils avaient passés de plus en plus de temps ensemble. De fil en aiguille, elle avait réellement oublié Tyler et c’était Connor qui avait pris cette place. Néanmoins, elle remercia d’un sourire son partenaire de shopping d’un sourire qu’il ne lui pose pas plus de question.

Il avait carrément changé de sujet pour retourner au premier : le parfum. Pourtant, la métisse relança le sujet. Elle avait besoin d’un avis masculin. D’ordinaire, elle aurait consulté Natéo mais ce n’était pas évident quand on ne faisait que se croiser. Chris était un homme, alors il pouvait l’aider à sa façon, lui donner quelques conseils. Puis elle n’était pas idiote au point de croire que ça se déroulait de la même façon pour tous, ni pour tous les couples.

- Non, je n’ose pas lui dire il est bien capable de se foute de ma gueule ! Commença-t-elle par répondre avant de poursuivre. Et le pire, c’est que je ne pourrais pas lui en vouloir. Pour faire simple, je lui ai déjà dit que j’étais amoureuse d’un autre, il m’a conseillé de le lui dire et il s’est avéré que le type en question se taper ma frangine. Et évidemment quand je l’ai découvert, c’est ma première personne que j’ai contacté, c’est lui qui m’a consolée.

Ces points évoquaient la partie à savoir si elle avait tenté de le lui dire. Et ce qui suit pour lui parler un peu du jeune Anglais.

- Il parle très peu, ce n’est pas évident de savoir quand ça va ou non. Quoi que quand il me fout à la porte de chez lui, c’est qu’il y a quelque chose mais le lendemain, il s’excuse ou fait comme si de rien n’était. Je voudrais juste qu’il me fasse confiance, qu’il se livre à moi. Un pauvre sourire se dessina sur ses lèvres. Chris, est-ce que tu trouves normal que je le connaisse depuis qu’il ait débarqué dans mon lycée et que je ne sache rien de son passé ? Tu crois qu’il me cache quelque chose de grave ?

Il n’y avait pas à dire, Naëlle se posait énormément de questions et elle ne pouvait pas l’interroger au risque qu’il ne se ferme comme une huitre. Pourtant, elle ne pouvait pas faire autre que s’inquiéter, entre ses sautes d’humeur, les cachets qu’il avalait au réveil et qui se trouvait dans l’un des tiroirs de sa cuisine.

Bizarrement la question posée par Chris, lui fit comme une petite pointe au cœur. Oui, il avait vu juste, c’était compliqué entre eux. Ils avaient deux caractères opposés ce qui provoquaient souvent des disputes.

- Oui, c’est compliqué ! Au début, je ne pouvais pas le supporter parce que je pensais que c’était un fils à papa, mais en fait non c’est juste un genre qu’il se donne. Je crois que je me souviendrais toujours de notre rencontre, on a fini dans le bureau du proviseur et l’un comme l’autre on a failli se faire virer du bahut.

Cependant, elle n’avait toujours pas osé lui raconter le pourquoi du comment. Même si leur première rencontre avait été houleuse, comme la semaine qui avait suivie, ça leur avait permis de se rencontrer.

- Tu me diras peut être que je me prends la tête pour rien, finit-elle par dire.

Bon voilà, Naëlle lui mit un peu dans le contexte de sa situation parce qu’avec quelques bribes, il ne pouvait pas spécialement conseiller comme il le fallait. Tout le monde était bien sûr différent et ne réagissait pas de la même manière ! Et surtout quand ça s’agissait de deux adolescents. Chris voulait en rire car ses 17 ans était loin derrière lui, et dire que dans les jours à venir il allait passer la barre des trentaines. Et comment ça lui remontait à loin et qu’il oubliait ce que c’était.

Et pour dire, Naëlle ne se compliquait pas la vie. D’avoir eu des sentiments pour un autre avant ce cher Connor qui semblait être un ours. Enfin ours, c’était vite dit, il l’était sûrement un peu sans véritablement l’être puisqu’il tenait tout de même à l’adolescente. La preuve étant qu’il l’avait consolé à ses dires.

Premièrement, je me demande - si ses sentiments sont réciproques - s’il l’a bien pris que tu lui ais avoué que tu étais amoureuse d’un autre. Ce n’est pas forcément le chose qui fait plaisir à entendre.

Surtout pour un mec !

Il est là depuis longtemps ?

Bon puisqu’il paraissait nouveau dans le lycée, mais qu’importait.

Je pense qu’il tient tout de même un minimum à toi puisqu’il était présent lorsque tu l’as appelé. S’il ne parle pas beaucoup, peut-être que personne ne lui ait appris véritablement à le faire. Qui sait s’il a vécu une tragédie ou que sais-je. Ce n’est jamais simple d’en parler, surtout si on nous brusque. Votre relation est récente alors il faut laisser le temps au temps, je pense.

Dans le fond, Chris comprenait la frustration de la jeune adolescente sur le fait qu’elle aimerait qu’il lui fasse confiance et surtout qu’il se livre à elle. Parce que rien que d’y penser, sa relation avec Ryan était un peu au pareil au même dans le sens que Ryan était du genre à intérioriser ses problèmes et ses ressentis alors que Chris avait beaucoup plus de facilité à les extérioriser. Alors le blondinet souhaiterait des fois que ça vienne de lui-même et non par un tirage de vers du nez.

Au bureau du proviseur ? Carrément ? s’étonna Chris.

Bon, aller jusque là c’était une chose mais c’était à cause de ça qu’elle se retrouvait puni à bosser à la pâtisserie, qui savait ? Bref, Chris ne voulait sûrement pas les détails des raisons. Ca revenait toujours au même : embrouilles, bêtises … Et encore ! des choses tout à fait typiques ! Surtout qu’apparemment, ils ne pouvaient pas se supporter donc bon, il ne fallait sans doute pas chercher plus loin pour comprendre. Si Naëlle se prenait la tête pour un rien ? Bon, ils étaient sûrement partis pour discuter un peu de ce genre de chose alors Chris fit :

Ca te dit qu’on se pose ?

Boire un coup ou s’asseoir près d’une fontaine du centre commercial parce que pas qu’ils ne voulaient pas continuer à discuter ici mais ils étaient quand même au milieu de la parfumerie. Sur ce, Chris pouvait embarquer au passage son flacon de parfum.

Naëlle n’avait pas eu de prime abord l’intention de se confier, de parler aussi librement. Elle n’était pas du genre à s’épancher de la sorte mais il fallait reconnaitre qu’aborder ce sujet, avait un effet libérateur. Certes, elle n’aurait pas toutes les réponses à ses questions néanmoins elle aurait quelques idées et conseils. Le plus simple aurait été probablement de se livrer à Connor mais elle connaissait le phénomène et ne répondrait vaguement aux questions, la laissant encore plus dans l’incertitude.

Est-ce qu’il avait bien pris la chose quand elle avait évoqué Tyler ? Elle aurait tendance à dire « oui » mais si elle poussait la réflexion à un plus loin, ça serait un « non » parce qu’il avait coupé la discussion juste après. Cependant, il l’avait écouté patiemment et avait su trouver des mots pour lui dire qu’elle était spéciale parce qu’elle n’était pas comme toutes les autres, même s’il lui avait également dit que c’était une chieuse. D’ailleurs, c’était une chose qu’elle appréciait chez son Anglais : son honnêteté. Il disait ce qu’il pensait même si ça ne plaisait pas, sans prendre des multiples détours pour faire passer la pilule.

- Fin octobre, il me semble ! répondit-elle-même s’il n’attendait pas réellement de réponse.

Il était arrivé fin octobre mais il avait débarqué au lycée à la mi-novembre. Elle savait que Monsieur avait eu besoin de temps pour s’acclimater – à savoir, sortir toutes les nuits – jusqu’à ce que son père y mette le holà.

- Je crois que le divorce de ses parents est l’une des conséquences de son silence, déclara la jeune métisse. Je ne l’ai jamais brusqué pour avoir des réponses, j’ai toujours pensé qu’il valait mieux attendre qu’il parle quand il serait près, même si ce n’est pas facile à vivre de se sentir parfois exclue de son monde.

En fait, c’était cela qu’elle avait le plus du mal à gérer. Le fait qu’il s’enferme dans sa bulle et que rien ne pouvait l’atteindre, pas même elle. Honnêtement, quand ça se produisant en sa présence, elle était effrayée parce qu’elle ne savait pas comment réagir, ni quand il allait refaire surface.

- Oui carrément, mais l’essentiel c’est que tout se soit arrangé ! Renchérit-elle.

Peut-être qu’un jour elle lui raconterait cette fameuse rencontre. Quand elle serait loin derrière elle et qu’on ne le lui reprocherait pas à tout bout de champ.

- Oui je veux bien, fut sa réponse.

Le temps qu’il aille chercher son parfum, Naëlle alla se chercher son gloss et son crayon puis le rejoignit à la caisse. Une fois leurs articles payés, les deux amis prirent place autour d’une table d’un café. Il n’y avait plus qu’à attendre le serveur pour passer commande.

- Chris, si je t’ennuie avec mes histoires il faut que tu me le dises ! lui annonça Naëlle, sachant qu’il avait probablement d’autres préoccupations de son côté. Je crois que mon souci est que je parle trop et que je ne montre pas assez, lâcha-t-elle machinalement.

Ok. C’était véritablement tout frais. Il venait tout juste de débarquer le bougre. Un peu un mois avant que Naëlle et lui soient ensemble, enfin selon les dires de l’adolescente. Chris ne connaissait pas la vie de ce Connor et aux dires de l’adolescente, il en tirait la conclusion que l’ado devait être perturbé. Typique. S’ils se retrouvaient au bureau du proviseur, et encore, normal… (et en plus si ça a été arrangé) mais le bougre ne semblait pas méchant puisqu’il semblait tenir quand même à Naëlle s’il l’avait écouté et soutenu après lui avoir avouer qu’elle était amoureuse d’un autre. Naëlle confirmait ses pensées quand l’information « divorce » apparue qui pouvait également expliquer beaucoup de choses.

Ouais, j’imagine ce que ça peut faire de ne pas savoir ce que peut penser l’autre…

Certes, pour sa part, il aimerait bien parfois savoir ce que Ryan pouvait penser si Chris ne lui tirait pas les verres du nez mais bon, c’était différent et il ne pouvait absolument pas comparer.

Le mieux dans tout ça était d’en parler mais à l’extérieur, pas dans cette parfumerie, debout, bondée de monde, non, ce n’était pas forcément très approprié pour une sacrée bonne discussion. D’où pourquoi il proposait de se poser !

Après être passés en caisse et réglé les derniers schmilblick, ils se posèrent à un petit café du centre commercial. En attendant le serveur, Chris et Naëlle reprirent la discussion. L’adolescent crut le déranger avec ce qui pouvait la préoccuper.

Oh ne t’inquiètes pas pour ça … Un café ?

Croisant le regard avec le serveur et après avoir fait un signe, le blondinet attira alors l’attention du serveur qui ne tarderait pas à arriver pour prendre commande. Naëlle avait enchaîner sur ce que pouvait être son souci. Chris prit un air de réflexion avant de dire ce qu’il pensait :

Je dirais plus un manque de confiance en toi. Tu cherches à ce qu’on te rassure et c’est normal pour une jeune fille de ton âge.

Le mécanicien voyait plus les choses ainsi. Après tout …

Et puis il faut dire que tu ne fréquentes pas un mec des plus simples, répliqua-t-il avec le sourire. Il faut croire que tu te compliques un peu la vie. Avec tout ce que tu m’as dit, je pense tout de même qu’il tient un minimum à toi…

Après tout, comment ne pas s’attacher à une Naëlle pareille ? Le serveur arriva à leur hauteur. Chris commanda alors deux cafés. Lorsqu’ils furent de nouveau seuls, ils pouvaient reprendre.

Je pense également que tu ne peux pas le forcer à s'ouvrir à toi mais à le laisser venir à son aise. Dans ce genre de cas, obliger quelque chose fait très souvent l'effet contraire de ce qu'on espérait.

Naëlle avait besoin d’un avis masculin vu qu’elle ne pouvait pas le faire avec son frangin. Et qui de mieux que Chris ? Il était un homme, avec plus d’expériences que ceux qu’elle côtoyait (et elle ne se voyait pas demandé à son proviseur ou même à Mr Montgomery), et qu’il vivait avec un autre homme. Il pourrait lui donner un avis personnel en se basant sur son vécu, et sur les deux points de vue. Elle savait aussi, qu’il ne serait pas du genre à lui quoi faire, comment s’y prendre parce que ça serait à elle de trouver le moment adéquat.

Elle donna encore quelques indications au mécano pour qu’il puisse mieux cerner le personnage. Enfin, même en les ayant en sa possession elle ramait, alors un inconnu n’aurait certainement pas plus de chance qu’elle. Et il va s’en dire, qu’elle pouvait se planter en toute beauté, qu’il y avait de choses qu’une personne extérieure puisse débusquer, parce qu’elle ne serait pas proche de l’individu évoqué.

Aussi bête que cela puisse sembler, elle fut soulagée de comprendre le sens caché de la phrase de son ami le surfeur. Mais elle ne dit rien à ce sujet, de toute façon ce n’était pas le lieu. Bref, ils se retrouvèrent assis à une table d’un café. Ils seraient beaucoup mieux assis pour discuter « garçons », cette pensée la fit sourire parce qu’elle n’aurait jamais pensé que ça lui arriverait un jour. Et elle était contente qu’il s’agisse de son voisin de table.

- Oui, un café ! Confirma-t-elle.

Il était vrai que la jeune femme était plus thé d’ordinaire mais une fois de temps en temps, elle faisait l’impasse pour quelque chose d’un peu plus corsé. Puis, ça l’aiderait à tenir un peu plus tard vu qu’elle avait des devoirs à finir. Elle enchaina sur le fait qu’elle parlait trop et n’agissait pas assez. On lui avait dit que parfois, les gestes valaient plus que des mots. Pourtant parfois, il fallait bien en mettre sur certains. Enfin bref, elle n’irait pas le contredire parce qu’il avait entièrement raison à ce propos.

- Probablement mais ça peut vite devenir un frein, à tous les niveaux : professionnel, personnel, amical !

Elle en avait conscience mais elle avait énormément de mal à se fier à elle, à se laisser aller. C’était pour cette raison qu’elle avait besoin d’avoir un certain contrôle sur sa vie, pensant que ça pourrait amoindrir ce fait. Autant dire qu’elle avait tout faux et sur tout la ligne.

Un sourire se dessina sur ses lèvres quand Chris lui avoua qu’elle n’avait pas choisi la facilité.

- On ne peut pas dicter à notre cœur de qui s’éprendre, dit-elle. Ca nous tombe dessus s’en crier gare. Le plus marrant dans cette histoire, c’est que son père m’a dit à notre première rencontre « vous avez tout d’une femme amoureuse ! », quand j’ai accepté de jouer le rôle qu’il m’avait attribué : celui de sa petite amie.  

Elle ne lui racontait pas pour faire la fanfaronne, juste parce qu’elle avait besoin d’en parler. Même chez elle personne ne le savait, ni dans ses amis hormis Johanna mais ceci est une autre histoire.

- Il m’arrive de le pousser à bout mais pas pour cette raison, expliqua-t-elle. Je n’ai jamais eu l’intention de le faire, même si j’avoue que ça me démange parfois. Et elle n’était pas franchement fière quand ça se produisait. En tout cas j’apprécie son père, il est de bonne compagnie même s’il se fait souvent envoyer paitre par Connor, il reste stoïque. Et ils ont beaucoup plus en commun qu’il ne le pense.

Elle était en train de se demander comment elle avait réussi à divaguer sur le père de Connor. Enfin si, elle l’avait évoqué un peu plus tôt.

- Et toi, ç’a été facile de savoir que c’était Ryan ?

Dans cette question il n’y avait aucune indiscrétion. Juste une pointe de curiosité, pour savoir comment il avait réussi à gérer ses sentiments.

- Je ne t’en voudrais pas, si tu préfères ne pas répondre !

Naëlle manquait cruellement de confiance en elle mais elle n’avait pas tort sur un point : cela pourrait être un frein pour n’importe quel domaine. Cependant :

C’est sûr ! Mais un travail sur soi ne se fait pas du jour au lendemain ! Ca se construit un peu chaque jour.

En tout cas, le fait que Chris commenta qu’elle n’avait pas choisi la facilité, le blondinet fut amusé de ce que l’adolescente pouvait lui répondre. On ne pouvait pas dicter son cœur, il s’attachait, point barre. Avant de se mettre avec Ryan, Chris aurait voulu s’enticher de quelqu’un d’autre, quelqu’un qui aurait la possibilité de l’aimer et non un hétérosexuel où là, il n’y avait véritablement moins de chance qu’une histoire soit possible. Mais bien au contraire, la vie réservait bien des surprises.

Ca ne sera pas moi qui dirais le contraire !

En écoutant encore et toujours Naëlle, celle-ci dériva sur une histoire du paternel de Connor, elle l’aurait donc rencontrée ! Et il apprit en plus que Connor et Naëlle avaient joué un rôle, d’où alors le « compliqué » et dont elle ne savait pas quand leur relation avait démarré alors… En plus, le coup du proviseur dans le lot… Chris ne voulait pas chercher plus loin de ce qui avait très bien pu se passer entre deux car ça paraissait bien loufoque ! En tout cas, ça ne serait pas lui qui jugerait quoique ce soit parce que bon, il avait également vécu des perles et des situations cocasses avec Ryan. A les raconter, ça ferait la taille d’une Bible.

Ok ! Ca me paraît bien loufoque cette histoire du père là… Après le coup du proviseur, j’ai un peu de mal à suivre ! avoua-t-il. Mais je ne pense que ce soit le plus important dans l’histoire.

Du comment ça avait démarré tout ça, peu importait ! C’était le présent qui était un peu plus important et du moins sur ce qu’elle pouvait ressentir, là, maintenant ! A l’écouter encore, Naëlle déclarait qu’elle le poussait parfois à bout, du moins lorsqu’il s’agissait d’aller un peu plus loin… Cela revenait également à ce qu’il disait, un manque de confiance en soi qui engendrait à un manque de confiance chez l’autre. Comment voulait-elle donner confiance si elle ne l’avait pas en elle et s’il n’y avait rien pour la rassurer également ?

Cela revient à ce qu’on vient de parler ! Le manque de confiance ! Après même si j’avoue que ce cher Connor ne t’aide pas non plus mais c’est un autre problème. Enfin deux problèmes qui sont liés tout de même l’un à l’autre. Tout ce que je ne peux que te conseiller, c’est d’essayer de te trouver, mieux te connaître pour avoir mieux d’assurance et tout suivra son cours tout seul en partie, je pense. Toi-même l’a dit, c’est un frein dans plusieurs domaines…

Naëlle, c’était Naëlle… Passant du coq à l’âne, elle avait enchaîné par la suite sur Connor et la relation de son père. Cela semblait être tendu entre les deux… Enfin, c’était un chemin dont Chris ne préférait pas spécialement s’aventurer parce que lui n’avait pas spécialement une bonne relation avec son père. Ce dernier l’avait renié lorsqu’il avait appris son homosexualité et il n’y avait plus eu de contact pendant 10 ans avant de le retrouver récemment et rien n’avait changé.

Les histoires de famille, crois-moi, parfois certaines relations ne sont pas évidentes. C’est triste mais penses bien à ce que je viens de te dire.

Oh, Naëlle avait dû voir mille et une couleurs en ce qui concernait la relation de Connor et son père mais elle s’éloignait également de ce qui concernait elle et ses peurs, et de sa relation avec Connor. Ne croyez pas que cela puisse déranger Chris de l’écouter mais il lui disait un peu ce qu’il pensait. Les cafés arrivèrent. Chris remercia le serveur et paya déjà la commande avant de continuer la conversation. Si ça avait été facile pour Ryan et lui… C’était une longue histoire !

Oula… Pour te dire vrai, … ça a été très compliqué !

Ryan était son deuxième amour de sa vie. Le premier étant décédé il y avait de cela des années, il fallait bien dire que Chris avait eu du mal à s’en remettre et même de s’attacher pour avoir une relation sérieuse mais avec l’arrivée de Ryan avec un début difficile et chaotique – du moins ils passaient leur temps à s’engueuler – Chris n’aurait jamais imaginé que leur relation puisse marcher mais surtout que Ryan tombe amoureux de lui un jour.

J’étais parti que notre relation était inespérée ! A la base, Ryan n’était pas du même bord que moi…

Si Naëlle voyait où il voulait en venir… Bref, voilà que Chris se mettait à raconter sa relation amoureuse – du moins son vécu - avec une adolescente de 17 ans.

On passait notre temps à s’engueuler et j’avais du mal à passer à quelqu’un d’autre… Après à savoir comment ça a pu tourné autrement, je ne saurais véritablement te dire mais ce jour-là, quand il a avoué ce qu’il ressentait, j’ai su…

Dans ce cas-là, ça avait dû être plus dur pour Ryan, c’était certain ! C’était un bouleversement, un changement radical, un an après leur rencontre. Ryan n’était pas du genre fou à vouloir changer de bord pour s’amuser, bien que leur début de relation, Chris avait eu peur que Ryan renonce ou change d’avis parce que ça ne lui convenait pas mais finalement, ça avait marché et les voilà encore aujourd’hui bien que depuis trois-quatre mois, ils passaient quelques mauvaises passes mais quel couple n’en avait pas sérieusement ?

Mais généralement, d'après mes expériences, ça se sait...

Oh oui, ça se savait si on voyait un avenir ou non, si on souhaitait être véritablement avec cette personne. Ca avait été le cas avec Matthew. Après, ces autres relations l'amenaient nulle part jusqu'à Ryan. Ces autres relations ne lui suffisaient pas ou parce que ce n'était pas ce qui lui fallait, tout simplement.

Oui, il fallait qu’elle apprenne à se faire confiance mais elle n’avait aucune idée de comment s’y prendre. Naé devrait commencer par arrêter à se comparer aux autres, chaque individu fonctionnait différemment. Ce qui était pour l’un ne l’était pas l’autre. Par exemple, ce n’était pas parce que Johanna portait des dessous affriolant sans complexe que cela serait réciproque que Naëlle, qui elle était beaucoup plus à l’aise dans quelque chose de plus simple, avec un peu de dentelle ici et là.

En fait, il lui faudrait commencer à apprendre à vivre pour elle, non pour ressembler à l’image qu’on se faisait d’elle. Elle avait toujours une petite fille modèle, se comportait comme on l’attendait d’elle. Voilà pourquoi ça se passait plus ou moins mal à la maison depuis quelques mois, Naëlle tentait de prendre son envol mais on la voyait encore comme une enfant. Quand elle devait aller chez une copine, elle devait demander la permission. Pour les rares soirées auxquelles elle était conviée, elle avait une liste à respecter : couvre-feu, pas d’alcool, appeler pour dire ou elle se trouvait… Elle n’avait pas encore son permis de conduire, prônant les transports en commun mais elle apprendrait plus tard que c’était l’excuse pour cacher les difficultés financières de la famille : qu’ils n’auraient pas pu acheter une nouvelle voiture et payer l’assurance.

La jeune femme l’écouta jusqu’au bout, il avait repris point par point ses interrogations. Oui, elle avait compris ce qu’il sous-entendait par « pas du même bord ». Après tout, on voyait beaucoup de couple divorcer après années de mariage parce que l’un des deux découvrait sur le tard qu’il était attiré par le même sexe.

- Je pense que tu l’auras deviné, c’est mon premier copain ! Je suis en train de découvrir jour après jour. Et ce n’était pas évident tous les jours. J’en suis amoureuse, c’est certain. Quand je suis avec lui, j’ai l’impression qu’il ne m’arrivera rien. C’est bizarre mais mon cœur s’emballe quand je le vois arriver au loin, et que je vais fondre quand il m’embrasse. Cela dit ce n’était pas suffisant à lui donner plus pour l’instant, même si ça devenait de plus en plus difficile pour l’un comme pour l’autre. Même s’il est difficile à comprendre, je reconnais que je m’ennuierai avec un autre. Je ne sais pas comment t’expliquer ce que je veux dire.

En fait elle voulait dire par-là, qu’un mec qui lui dirait amen pour tout afin de satisfaire ses moindre désir. Connor laissait passer certaine chose, mais il savait la remettre à sa place. Elle avait besoin de quelqu’un qui ne la considère pas comme la petite dernière de la famille et il ne demande pas de rester à sa place.

Tout en tentant de lui expliquer ce qu’elle ressentait, parce qu’il lui faudrait mettre des mots dessus. Elle trouvait que cet exercice n’était pas évident, parce qu’il fallait savoir doser. Naëlle avait réfléchi à ce qu’elle voulait, ce qui lui permettrait de se trouver, d’être enfin elle.

- Je sais déjà que je veux un métier en rapport avec les enfants mais ça tu le sais déjà, que je voudrais changer un peu de style vestimentaire parce que j’ai passé l’âge des tenues de petites filles modèles. J’ai déjà l’uniforme au Lycée, je veux être moi quand je n’y suis pas. J’ai aussi envie d’un tatouage, de passer mon permis et d’aller choisir mon véhicule comme apprendre à réparer quand c’est possible je ne voudrais pas te voler ton job.

Naëlle sourit en s’imaginant en bleu de travail avec des traces de cambouis sur le visage. Il y avait peut-être un petit côté sexy la dedans, ça pouvait changer du traditionnel fantasme en blouse d’infirmière.

- Je vais te dire un truc con, mais j’ai envie de faire partie de ses américains qui s’embrassent sur le grand écran lors d’un match de basket, c’était totalement débile parce que dès les deux épiques dans les vestiaires après le dernier coup de sifflet, on oubliait ces fameux couples. Sauf s’il s’agissait de Ben Affleck et Jennifer Garner.

Je vois parfaitement ce que tu veux dire …

C’était dur de pouvoir déposer un mot sur ce qu’on pouvait ressentir, n’est-ce pas ? Du moins la première fois qu’on ressentait cette chose sans savoir que c’était ce qui s’appelait l’ « Amour ». Chris avait la chance de l’avoir rencontrer une première fois et … une deuxième fois, n’imaginant pas qu’on pouvait avoir plusieurs amours dans une vie… Du moins, le retrouver !

Sur ce, dans le fond, Chris ne pouvait qu’esquisser un sourire à écouter les « aventures » de Naëlle, du moins – autre que sur ses amours - sur sa vie d’adolescente, la découverte de soi, ses envies … Des envies banales et normales ! Enfin, excepté le tatouage, peut-être… L’idée de se faire tatouer, Chris en était peut-être un peu trop peureux de ce genre de phénomène. Son compagnon avait un tatouage sur l’épaule, un tatouage un peu bizarre mais bref, Chris avait dû mal à piger cette passion pour ça… Même Cassandre avait chopé le virus, du moins, Chris ne savait si elle avait fini par en faire un… Bref, à part ça, s’interroger sur sa vie professionnelle, passer son permis de conduire… Que des choses bateau et normales à cet âge ! En tout cas, Naëlle n’était pas l’adolescente qui cherchait à jouer faux et c’était peut-être ce qui la rendait si attachante.

Un jour, tu arriveras bien faire tout ce que tu souhaites… Il faut juste un peu que le temps se fasse et … Oh, je ne compte pas à que tu piques mon job, hey .. râla-t-il presque avec le sourire aux lèvres avant de proposer : Mais je peux toujours te donner quelques tuyaux au moins, sur les réparations et même la conduite.

Sur ce, aux dernières paroles de Naëlle par rapport à ce genre de baiser stéréotypé qu’on pouvait voir au cinéma, et tout ça, Chris ne put s’empêcher d’avoir un rire franc. Oh, pas qu’il se moquait, alors que pas du tout. C’était connu que les adolescentes étaient d’un romantisme et le romantisme n’était pas quelque chose qui le dérangeait, lui-même.

Dites-moi, c’est un grand rêve que vous avez–là !

N’avait-on pas ce genre de perspective complétement loufoque une fois dans la vie ? Comme un saut en parachute ? Sauter en haut du grand canyon ou du haut de la statue de la liberté ? Nager au milieu des dauphins ? Traverser les Etats-Unis qu’avec une moto et un sac à dos, et rien d’autre ? Ou même encore camper au milieu de la montagne à la façon Brokeback Mountain sans le côté tragique !

Tu as d’autres rêves comme ça ?

Oui ce n’était pas évident de mettre des mots sur ses sentiments lorsqu’il s’agissait de sa première expérience. Néanmoins, Chris était beaucoup plus âgé qu’elle et était déjà passé par là. Quoi qu’il fallait reconnaitre qu’il existait des personnes qui n’étaient jamais tombées amoureux avant leurs 35 ans ou encore plus tard. Puis Naé trouvait bizarre de dire à quelqu’un d’autre que le principal intéressé qu’elle était amoureuse.

Les deux amis finirent par changer de sujet de discussion, ils ne s’étaient pas retrouvés ici pour passer leur après-midi à parler de Connor et de ses sentiments pour lui.

La jeune métisse avait encore beaucoup de chemin à faire pour se découvrir. Certes, elle demanderait de l’aide quand cela serait nécessaire mais il lui faudrait faire la plus grande partie seule. Donc ce fut le plus naturellement qu’elle fit par à Chris de ses envies, même aussi simplet qu’elles puissent être. En même temps, Naëlle n’était pas du genre à se conduire comme les petites princesses qu’elle côtoyait au Lycée, elle connaissait la valeur de l’argent et les concessions à faire pour se faire un petit plaisir.

- Ce n’est pas de refus, répondit-elle au sujet de la mécanique. Comme savoir changer un pneu crevé, ça m’évitera de me faire accoster par un tueur en série !

Enfin pas seulement, il y avait beaucoup d’autres d’énergumènes qui circulaient librement dans les rues New-Yorkaises. Mais pour l’instant, elle était une petite chanceuse elle n’en avait encore rencontré aucun. Hormis les crétins qui fréquentaient son bahut mais ils étaient tout de même hors catégorie.

L’adolescente fit part d’une de ses envies. C’était complétement idiot de vouloir vivre une telle chose, mais elle aimerait bien que ça lui arrivait. Pourquoi les autres y auraient droit et pas elle ? Peut-être qu’un jour… Ou peut-être pas. Elle n’en ferait pas une maladie pour autant, ça faisait partie des aléas de la vie.

- Partir en vacances par exemple, visiter l’Irlande et Hawaï pour connaitre un peu mieux mes racines, aller à Disneyworld, n’hésita-t-elle pas lui répondre. Tu vois ce n’est pas bien grandiose mais voilà ce qui me fait envie. Et les tiens de rêves, ils ressemblent à quoi ?

Qui mieux de Chris pourrait la conseiller en ce qui concernait tous les secrets d’une voiture ? Le blondinet ne pouvait qu’émettre un petit rire lorsque la jeune Naëlle faisait référence à un tueur en série ! Certes, c’était un peu exagéré mais il fallait avouer qu’on pouvait tomber sur n’importe qui et Naëlle était une magnifique jeune fille, ce n’était pas comme si on allait enquiquiner un mec, bien que ça pouvait arriver.

Si je pouvais au moins te faire éviter ça, je serais un héros ! répliqua-t-il amusé.

Ce n’était peut-être pas grand-chose mais Chris prit plaisir à l’écouter, à s’intéresser à elle. Pour dire, Chris appréciait faire des rencontres, que ce soit généralement à son boulot, qui en plus, de son côté social, arrivait à fidéliser certains clients (si ce n’était pas avant tout par son boulot !) mais Naëlle était un coup de cœur à vrai dire. Elle lui donnait vraiment l’envie de la protéger de quoique ce soit, du moins, de veiller sur elle si tout allait bien.

En tout cas, Naëlle avait de sacrés projets. Qui n’en avait pas, sérieusement ? Qui ne rêverait pas de voyager, d’aller voir le bout du monde ? Des petites choses comme ça qui pouvaient sembler bête mais qui contribuaient à un bien-être… Des petits rien qui faisaient plaisir… Il ne suffisait pas grand-chose.

Pas besoin d’aller sur la lune pour que ce soit grandiose !

C’était une image bien sûr ! Mais l’idée était là ! A quoi ressemblaient ses rêves à lui ?

Pour le moment, j’ai tout ce qu’il me faut sous la main !

Chris n’avait jamais imaginé pouvoir retrouver l’amour un jour et il ne pouvait pas rêver mieux de ce qu’il avait aujourd’hui : une vie de famille. Professionnellement parlant, il était accompli. Que demander de plus ? Un mariage ? Ca, Chris n’y pensait pas pour le moment… Mais un rêve tout simplement débile ?

Mais si un jour, je dois rencontrer Adam Lambert, je m’enfuis avec lui ! plaisanta-t-il.

D’un côté, ce n’était pas faux, il s’agissait d’un de ses chanteurs préférés et Adam était beau comme un dieu ! Bien sûr, ce n’était qu’un rêve ! Un fantasme ! Ce n’était pas comme s’il n’avait pas Ryan sous la grappe et qui s’appelait « réalité ». Bien évidemment ! Un peu plus sérieusement, pour le moment, il avait un « rêve » un peu plus particulier : que son père l’accepte comme il était mais c’était bien sûr de quelque chose d’inespéré.

Bon alors, Mademoiselle Sullivan, quelle est la suite du programme de la journée ? enchaîna-t-il.

- Et même pas obligé d’enfiler un pyjama comme Superman ou Spiderman ! Le taquina-t-elle.

A vrai dire, il se serait agi d’une autre personne que Chris elle n’aurait pas osé répondre une telle chose. La lycéenne ne comprenait pas que les filles puissent se pâmer sur ces supers héros. Honnêtement, il n’était pas les mieux. Enfin, c’était un paradoxe quand on songe qu’elle adore la saga Twilight mais pas des personnages principaux. Pour elle, ils étaient plats et sans intérêts. Elle s’intéressait plus aux secondaires comme Paul, un des loups-garous ou Emmett, un Cullen.

Elle lui parle de ses envies, de ses rêves. Pour elle, ce n’était pas grand-chose par rapport à certains. Elle voulait aller à Disneyworld au moins une fois dans sa vie, avec une bande de copain. Le voyage à Hawaï et en Irlande, c’était pour découvrir ses origines et pourquoi pas quelques membres de sa famille. Bien sûr, elle en avait d’autres qui se profileraient avec le temps. Comme ceux qu’elle n’avait pas évoqués de peur que ça ne se réalise jamais.

Naé fut amusée par la réponse de Chris. Pas pour se moquer de lui, parce qu’il avait effectivement tout ce dont on pouvait rêver : un chéri, un enfant même s’il n’était pas de lui, des amis, un travail, un toit sur la tête. Ce qui l’amusait c’était la partie sur Adam Lambert.

- Et tu me laisserais toute seule avec des tueurs en série, des requins dévoreurs de Naé ? Dit-elle tout sourire. Mais j’avoue qu’il est plutôt beau garçon.

Bah oui quoi, on lui avait donné en parfait état de marche alors elle s’en servait quand elle en avait l’occasion. Ca servait aussi à voir la concurrence quand il y en avait une, et faire en sorte de l’évincer. Enfin quand on en voyait une. Toutefois, actuellement les yeux de Naé étaient souvent occupés à regarder dans la direction de Connor. Elle pouvait en profiter durant les interclasses, vu qu’ils ne passaient pas leur temps libre ensemble. Notamment parce qu’ils n’étaient pas de la même promo, une les séparait et qu’ils n’avaient pas cours aux mêmes heures. Et aussi parce qu’ils essayaient d’être discrets vu qu’ils s’étaient faits chopper par le proviseur dans les couloirs désertiques.

- La papeterie, j’ai besoin de fournitures pour le lycée et ensuite, faut que je trouve des chaussettes !

Ce n’était pas folichon mais elle en avait réellement besoin. La jeune femme faisait passer ses envies après ses besoins. Par exemple, elle aurait bien aimé s’offrir un pull pour se faire plaisir mais elle attendrait : la saint valentin approchait et elle voulait offrir un petit quelque chose à son Anglais, elle allait bientôt manquer de feuilles pour ses devoirs ou pour ses impressions, de stylos et une grande partie de ses chaussettes était bonne pour finir en chiffon pour la poussière.

Les deux amis s’étaient remis en marche quand ils eurent quitté les cafés. Il fallait prendre l’escalator pour aller à l’étage inférieur, longer quelques boutiques ou les prix étaient hors de prix, et une série de photomaton. La jeune femme y jeta un coup d’œil, comme elle le faisait à chaque fois qu’elle passait à côté et elle constata qu’il n’y avait quasiment personne pour une fois. A moins que ce soit l’heure.

Tournant le regard vers le mécano, elle osa lui poser une nouvelle question :

- Chris, qu’est-ce qu’on doit offrir à son copain quand c’est notre première Saint Valentin ?

Un pyjama. C’était peut-être le mot « débile », ou plutôt le mot « juste » pour bien illustrer ces déguisements des super-héros. A savoir ce qui pouvait réellement passer dans l’esprit de ces dessinateurs pour mettre des slips – et en plus rouge – à ce Superman, par exemple ! L’inspiration était peut-être venue des shorts des sauveteurs d’Alerte à Malibu ou n’était-ce le contraire ! Enfin de toute manière, à penser ceci, c’était partir dans un sacré délire ! Et dire qu’on ne voyait pas forcément les vrais héros de la ville, ils ne portaient pas un costume flagrant des super-héros qui marquait bien les esprits de la population mais on ne pensait pas forcément aux policiers ou aux pompiers qui risquaient leur vie pour protéger les individus. Chris sortait avec un flic. Bon, à la base, à savoir si ce n’était pas quelque chose qui l’avait attiré. Il ne saurait le dire, bien que Ryan ne faisait parti que de la police scientifique, ce qui était tout autre chose mais il participait tout de même à l’investigation dans le même but de protéger la population. Tant qu’il laissait son flingue caché, hors de sa vue, tout allait bien. Chris avait horreur des armes et en avait sûrement une bonne peur bleue. Il n’oserait en toucher une de peur de se tirer une balle dans le pied. Contre la violence, le blondinet était trop le genre de gars « Peace & love ».

Je ne sais comment ils font avec ces collants et tout ça. Ce n’est pas forcément esthétique et beau !

Pyjama débile et aussi moche. C’était loin d’être à la mode. Pour dire, Chris n’oserait même pas porter ce genre de costume. S’il se devait se faire une soirée déguisée un jour, jamais ils ne porteraient ce genre de costume – même si ça pouvait être amusant - il laisserait ce plaisir à Fred. Bref, ça se voyait bien que ce n’était pas trop le trip de Chris tout ça.

Déjà, il faut que ce soit réalité !

Rencontre Adam Lambert était une chose, s’enfuir avec en était tout autre. Donc ce qui voulait bien dire que Chris n’était pas prêt de déguerpir aussi vite. De toute manière, étant né et ayant grandi à New York, pas sûr qu’il fuirait réellement la ville. Il était enraciné ici avec des gens importants pour lui, et cela dit :

Je peux toujours trouver le moyen de l’enfermer dans mon placard. T’en penses quoi ?

C’était une idée très très vilaine ça. Mais heureusement, rien n’était véritablement sérieux ! Cela dit, le blondinet ne put s’empêcher de demander la suite des évènements. Après tout, il n’était pas trop pressé bien qu’il aura des gens qui l’attendent chez lui mais ils seront bien capables de se passer de lui pour quelques heures.

Ca va ! Les missions ne semblent pas très difficiles !

Oui, largement. Papeterie et chaussettes, il y avait de quoi de faire ! Tout en repartant à l’aventure au milieu de ce gigantesque centre commercial avec ses étages : c’était presque un musée, un labyrinthe… mais ce n’était pas spécialement déplaisant. Cela dit, tout en se déplaçant, voilà que la jeune femme lui posa une nouvelle question pour ne pas dire une nouvelle colle. Elle voulait tout simplement un conseil.

Et bien… il n’y a pas forcément de règles…

« Qu’est-ce qu’on devait offrir ? », devoir en revenait à une obligation alors que pour Chris, ce n’était qu’une fête commerciale, bien que d’offrir quelque chose à un être cher pouvait être plaisant. Alors à savoir quoi offrir, c’était une autre affaire que Chris pouvait comprendre un peu la difficulté, surtout si cela concernait un premier Saint-Valentin et tout dépendait des goûts de l’autre personne.

Je ne saurais trop te dire. Les trucs classiques qu’on nous propose, ce n’est pas forcément le top.

Entre les chocolats, ou trucs qui ne servaient à rien comme les coussins en cœur.

Quelque chose de personnaliser peut-être sympa. Une gourmette, par exemple !

Pour une fille, c’était un peu plus simple entre un quelconque bijou, un bouquet de fleurs. Mais un homme … Surtout que Naëlle était encore une adolescente et n’avait pas forcément de grands moyens.

A la base, c’est une fête commerciale ! Après, je pense que ce n’est pas forcément le cadeau qui compte. Après tout dépend de la soirée que tu passes : un restaurant, un cinéma … C’est l’occasion de sortir et de passer un bon moment. Je pense que c’est un peu ça la vraie surprise ! Le reste : que détails !

C’était le meilleur conseil qu’il pouvait lui donner. Après tout, rien n’achetait véritablement la relation, la complicité, le lien qui unissait entre les deux personnes bien qu’on tenait généralement à ce qu’on souvienne de cette fameuse soirée.

Sur ce, remarquant les photomatons et surtout le fait qu’il n’y avait pas spécialement grand-monde, une idée traversa l’esprit de Chris. N’était-ce une part de folie pour sa part ou n’était-ce le fait qu’on ne prenait pas forcément le temps pour certaines choses, il lança alors :

Quand je parle de mémoriser quoique ce soit, ça te dit un petit délire ?

En disant cela, il jeta quelques coups d’oeil en direction des photomatons pour lui faire comprendre de quoi il parlait.

Chris venait de marquer un point. Les hommes en collant n’avaient rien d’attirant, ça dévoilait trop de forme. Ça pouvait passer sur les danseurs étoiles ou les patineurs sur glace, et encore. Après, il y avait ceux qui aimait et les autres, c’était pour les types tous musclés et huilés, ceux avec les cheveux longs jusqu’aux reins. Enfin comme lui avait dit sa sœur une fois « il faut de tout pour satisfaire tout le monde ! ». Cependant, ces hommes étaient obligés de porter ce genre de vêtements pour pratiquer leur sport, pour l’esthétique. Tout comme ils devaient savourer le moment de passer un habit beaucoup plus aérien, qui ne leur collaient pas à la peau. Quoi qu’il en soit, elle était du même avis que son cher ami le mécanicien sur ce sujet.

La lycéenne était rassurée sur le fait que même en vieillissant on avait encore des fantasmes d’adolescent. S’enfuir à l’autre bout du monde avec son artiste préféré.

- Je ne suis pas certaine que Ryan apprécie qu’il y ait un homme dans votre placard ! Faudrait plutôt que tu le caches dans ton vestiaire au garage.

Enfin en même temps, pauvre Adam Lambert ! Bah oui, il finirait par avoir mal aux pattes de rester debout, de se déshydrater parce qu’il allait faire chaud dans le casier de Chris. Sans oublier la puanteur s’il ne pouvait pas user de la doucher à sa guise. Sans oublier les flics parce qu’il y aurait bien évidemment à un avis de recherche et peut être une prime pour celui qui mettrait la main sur l’artiste.

Les deux amis partirent en direction de la papeterie vu qu’elle avait des achats à faire pour le lycée, puis il lui faudrait faire un détour par un magasin pour trouver des chaussettes. Sur le trajet, la jeune femme l’interrogea sur les cadeaux de St Valentin, surtout pour une toute première. Certes, c’était très commercial et que les prix étaient exorbitants à cette période. Cela dit, Naëlle voulait marquer le coup même si Connor la regardait bizarrement, parce qu’il était comme le blondinet à ce sujet. C’était surtout une idée, des conseils, dont elle avait besoin. Elle médita quelques instants quand elle eut des réponses de la part du trentenaire.

- Je comprends le message que tu essaies de me faire passer ! Il faut que ça vienne du cœur. Tu crois qu’il apprécierait un collier de nouilles ? Elle sourit amusée parce qu’elle venait de dire, parce qu’il y avait à parier qu’il aurait une crise de fou. Je le saurais quand je trouverai, merci Chris !

Oui, ça pouvait être quelque chose de symbolique pour eux deux, leur couple. Pas forcément un objet qui pourrait lui rappeler elle, dès qu’il poserait les yeux dessus. Elle pourrait lui offrir des bouquins, parce qu’il y en avait plein dans sa chambre mais lequel ? Le Kâma-Sûtra. Non quand même pas, ça enverrait un message tout autre que celui recherchait : à savoir « je sais que tu aimes lire ! » pour elle, et pour lui ça voudrait dire « je veux coucher avec toi, on tente laquelle ? ».

Chris lui posa une question, intriguée Naé suivit du regard la direction vers laquelle il était en train de regarder.

- Cap ou pas cap ? Fit-elle comme si elle avait retrouvé ses 5 ans.

Sans lui laisser le temps de répondre, elle attrapa son compagnon de shopping par la main et l’entraina vers les photomatons. Ils entrèrent à l’intérieur, les pièces furent insérées dans le monnayeur. Ils ne leur restaient plus qu’à prendre quatre poses de leur choix. Aucune obligation de sourire, d’être sérieux. Toutes les grimaces étaient possibles, ainsi que les rires qui s’échappaient de la cabine. Néanmoins, ils ne faisaient rien de mal. Pour une fois, le photomaton ne recevait pas la visite d’un couple qui voulait s’envoyer en l’air dans un lieu public, à la vue de tous.

Quand ils sortirent de leur cachette, ils récupérèrent leurs clichés et finirent par gagner la papeterie. Naëlle erra dans les rayonnages, elle aimait voir pour ses papiers et toutes ses couleurs. Elle était surtout attirée par les stylos : les classiques, les fantaisistes, les colorés, les miniatures. Aujourd’hui, il en faisait même pour les gauchers.

- Alors, elles donnent quoi ? Demanda-t-elle en revenant vers son accompagnateur.

Elle tenait dans ses mains les articles qu’elle était venue chercher. Elle voulait savoir si les photos étaient réussies ou ratées.

Adam Lambert dans son placard ? Jamais de la vie ! Chris ne donnerait pas cher de sa peau. On ne dirait pas comme ça mais voir un Ryan jaloux, c’était quand même magnifique. Et d’autant plus, Naëlle ne le poussait absolument pas aux vices : il faudrait qu’il cache ce Lambert à son boulot. Pas mauvaises idées ! Cela dit, heureusement que ce n’était pas réel et encore heureux qu’il ne le ferait jamais ! Parce que, à inverser les rôles, c’était certain que Chris n’accepterait pas de trouver une Angelina Jolie ou encore une autre créature humaine dans son placard et en plus, de vouloir partager son Ryan avec quelqu’un d’autre : c’était impensable !

En tout cas, il n’empêche qu’ils arrivaient à parler un peu plus sérieusement. Enfin, la demoiselle lui demandait des conseils. Chris lui donna évidemment son avis, de la manière dont il voyait les choses. L’adolescente voyait totalement où il voulait en venir avant qu’elle lui sorte l’idée du collier de nouilles où franchement Chris ne put s’empêcher d’avoir un rire franc. Elle n’était pas croyable à sortir des sornettes pareilles. Pas qu’il n’en avait pas pris l’habitude ou n’avait pas déjà eu un aperçu quand ils avaient eu leur moment au zoo, mais il fallait bien croire que ce n’était pas possible rester cinq minutes sérieusement. Mais en tout cas, elle finira sans doute par trouver quelque chose pour son Valentin, parce que bon, d’un autre côté, Chris ne connaissait pas spécialement la bête et ses goûts.

Cap ou pas cap ? Ce n’était pas des choses qu’il fallait lui dire ! Bon, à regarder les photomatons, il n’aurait pas posé la question s’il n’était pas cap ! Et il n’y avait véritablement rien de mieux pour ne plus jamais garder son sérieux ! C’était si simple de retomber en enfance mais il n’y avait véritablement aucun mal à ça ! Les photos allaient donner à faire des grimaces pareilles que sans doute, faire une photo sérieuse, était vraiment difficile !

A la papeterie, vagabondant dans les rayons, les photos en main, il fallait aussi croire que de les secouer pouvait faire quelque chose pour que l’encre sèche et tout ça, c’était d’un automatisme. Cela dit, qu’est-ce que ça donnait ?

Franchement ?

Pour le moment, il n’y avait que Chris qui avait vu le résultat. Pas Naëlle. Et il avait envie de la charrier.

Une horreur ! répondit-il avant d’afficher un sourire déconneur. Non, ça va ! Elles sont énormes ! Tiens, gardes-les !

Un plaisir de lui offrir. Ca lui ferait quelques souvenirs !

C’était peut-être con mais la jeune brune appréhendait la réponse du mécanicien. Genre les clichés équivalaient les traditionnelles photos qu’on faisait les photos au bahut pour l’album de fin d’année. Elle fit la grimace quand son ami et confident commença à prendre la parole. Heureusement qu’elle n’était pas du genre capricieuse parce qu’elle n’aurait pas hésité à taper du pied au sol.

- Oh, merci ! dit-elle en prenant les photos d’identité d’eux deux, avant de lui faire un énorme bisou sonore sur la joue. Bah quoi ? J’ai pas le droit d’embrasser mon cousin ? demanda-t-elle à quelques personnes alentours outrées par son comportement, ce n’était qu’un bisou amical.

Naé sourit en les examinant, elle prit le temps de ranger la planche dans son sac à main avant d’aller payer ses achats. Cela faisant, elle était en train de chercher la place ou elles allaient trôner. Elle voulait que ce soit en vue, parce qu’elle était avec Chris.

Enfin bref après la papeterie, ils allèrent chercher des chaussettes pour elle. Une rose avec des fleurs tout aussi colorée, une avec Betty Boop, une autre avec des nounours, et un lot de socquettes blanches pour le lycée, du moins les cours de sport. Elle avait failli prendre un lot de culotte avec les jours de la semaine inscrits dessus mais un regard en direction du blondinet l’en dissuada.

- Merci pour cette virée, le remercia-t-elle à l’entrée du centre commercial, au moment de se séparer. Il faudra qu’on se refasse une aprem comme celle-ci, avoua-t-elle parce qu’elle avait passé un agréable moment.

Naé prit son bus, parce qu’elle n’avait pas voulu qu’il fasse le tour de la ville pour la raccompagner à bon port. Une fois chez elle, la métisse prit la direction de sa chambre pour ranger ses achats puis accrocher les photos d’identité de Chris et elle. Elle coinça l’un des coins à son miroir. Il y avait déjà des photos de ses copines, même certaines qu’elle ne voyait plus depuis son entrée au collège. D’ailleurs, il lui faudrait peut-être faire le tri et costumiser une boite à chaussures pour ne garder que les personnes importantes qui faisaient partie de sa vie. Il manquait le plus important, elle n’avait pas réussi à le photographier sauf sur téléphone portable mais ça ressortirait mal si elle tentait d’en imprimer une. Elle se promit de demander à Mr Montgomery s’il n’en avait pas une à lui donner.